La fabrication des ennemis en Algérie est un outil de domination politique. Pour la Kabylie, qui n'a aucun intérêt à cette logique ni aucune envie de détester qui que ce soit, cette stratégie constitue un problème majeur. Depuis l'indépendance, le régime algérien a systématiquement utilisé cette méthode pour maintenir son autorité sur le peuple. Cette politique, profondément enracinée dans le système politique algérien, vise à détourner l’attention des véritables problèmes sociaux, économiques et politiques en créant un climat de méfiance généralisé envers tout ce qui est perçu comme étranger ou contraire à l’idéologie officielle. Parmi ces « ennemis » figurent Israël, la France, le Maroc, la laïcité, et même la Kabylie.
Israël est souvent présenté par l’Algérie comme l’ennemi ultime du monde arabo-musulman. Cette rhétorique anti-israélienne sert à mobiliser les masses pour maintenir un sentiment d’unité nationale face à une prétendue menace extérieure, brandie à la moindre contestation et dont les kabyles sont des cibles donnés à la population et pointés du doigts comme des traitres à la nation , traités constamment des agents à la solde des juifs et de la France. De même, la France, demeure, malgré le temps, un bouc émissaire central. Les relations franco-algériennes, marquées par un passé colonial douloureux, sont instrumentalisées pour attiser un ressentiment populaire et justifier l’échec des réformes économiques et sociales. Avec ces prétendus adversaires qui n'ont rien à voir avec les problématiques internes qui sont identitaires et politiques en ce qui concerne la Kabylie , le pouvoir tente en vain de détourner l’attention de la population des velléités d’indépendance de la Kabylie pour garder son emprise sur la population.
Le régime algérien alimente activement la haine envers les non-musulmans, en particulier les chrétiens, qui sont majoritairement d’origine kabyle. À travers une propagande incessante, l’État désigne ces derniers comme des traîtres ou des agents étrangers, les accusant souvent d’être liés au Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK). Cette diabolisation constante ne se limite pas à une exclusion sociale : elle encourage directement la persécution de ces Kabyles, non seulement par les autorités, mais aussi par la population elle-même, nourrie par un discours officiel hostile.
Les chrétiens kabyles sont ainsi la cible d’agressions, de discriminations et d’emprisonnements arbitraires, pourtant, l’histoire kabyle est marquée par la diversité religieuse et la coexistence pacifique entre différentes confessions. Bien avant l’islamisation de l’Afrique du Nord, le christianisme faisait partie intégrante de l’identité kabyle, comme en témoignent des figures emblématiques telles que Saint Augustin (354-430), évêque d’Hippone et l’un des plus grands penseurs du christianisme, Tertullien (155-220), écrivain chrétien berbère, ou encore Saint Cyprien de Carthage (200-258). Contrairement à la propagande officielle qui présente cette religion comme une menace occidentale, elle est enracinée dans l’histoire du peuple kabyle et constitue un patrimoine à part entière.
Le régime algérien n’a pas seulement créé des ennemis extérieurs qui n’en sont pas, elle a également façonné des ennemis internes afin de maintenir son pouvoir. La Kabylie, reconnue depuis des siècles pour sa résistance et son attachement à la terre, est devenue l’un des principaux boucs émissaires du régime. Les revendications identitaires et politiques des Kabyles sont systématiquement réprimées et présentées comme une menace, poussant une partie de la population, imprégnée de l’idéologie d’État, à voir les Kabyles comme des agents de l’étranger, au service d’Israël ou de la France. Cette manipulation ne sert qu’à protéger les intérêts du pouvoir en place, en détournant l’attention de leurs véritables problèmes, mais surtout alimente les discriminations et la haine.
Le régime algérien a façonné une société méfiante envers tout ce qui est exogène ou non arabe. Cette ingénierie de la peur a profondément marqué les mentalités, rendant difficile l’ouverture sur le monde et l’acceptation de la diversité. Elle engendre de la violence et nourrit l’intolérance. Les Kabyles, pourtant porteurs de valeurs de laïcité et de tolérance, se retrouvent piégés dans une stratégie qui ne sert en rien leurs intérêts. Ils sont ciblés non seulement par l’État, mais aussi par une société façonnée pour les percevoir comme des éléments déviants et subversifs à combattre.
Pour les Kabyles, il est crucial de déconstruire cette vision imposée par l’État. Ni la France, ni Israël, ni les juifs ne sont des ennemis de la Kabylie. Ces accusations sont des fabrications du régime, destinées à diviser et affaiblir. De la même manière, les Arabes, bien qu’instrumentalisés par le pouvoir, ne doivent pas être perçus comme des adversaires. La lutte kabyle ne doit pas être dirigée contre des ennemis fictifs, mais sur l'indépendance de la Kabylie comme seul lutte légitime.
Le régime algérien a utilisé la fabrication d’ennemis comme un outil efficace pour asseoir son pouvoir. Cependant, cette stratégie a des conséquences désastreuses sur l’image du pays et sur la cohésion sociale. La Kabylie, quant à elle, n’a aucun ennemi : ni les Algériens, ni les juifs, ni le Maroc, ni encore moins la France. Ces prétendus adversaires ne sont que des créations du régime, qui a cultivé une mentalité où toute idée contraire est rejetée avec violence.
Cette politique engendre une société incapable de tolérer la différence et propage une haine anti-kabyle largement entretenue par l’État algérien. Il est essentiel que les Kabyles se libèrent de ces ennemis fictifs et refusent d’adopter cette haine inculquée par le régime, une haine qui ne sert que les intérêts des régimes arabo-islamiques
et non l’avenir de la Kabylie. La construction d’un avenir pacifique et prospère passe par une reconnaissance mutuelle, l’acceptation des diversités et une rupture avec cette logique de division imposée par l’État algérien.
HESTIA.S