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Libération de Younes Bounadi : une lueur pâle dans la nuit kabyle

(SIWEL) — Quatre années. Quatre longues années arrachées à la jeunesse d’un homme coupable seulement d’avoir aimé sa terre avec trop de ferveur. Younes Bounadi, ce nom désormais gravé au martyrologe kabyle, vient de franchir les portes de l’enfer carcéral algérien. Mais peut-on vraiment parler de liberté lorsque l’on émerge d’un système conçu pour briser les âmes ?

Son crime ? Avoir osé. Oser croire en une Kabylie libre, oser défier l’hydre autoritaire qui, depuis Alger, étend ses tentacules sur les montagnes et les plaines de la Kabylie. Enlevé dans la nuit du 23 juin 2021, Younes Bounadi a subi ce que le régime réserve aux fils indociles de la Kabylie : une parodie de justice, des cellules croupissantes, des coups qui meurtrissent autant la chair que l’esprit. Condamné d’abord à quinze ans – un chiffre qui en dit long sur la peur panique qu’inspirent les voix libres –, sa peine fut réduite à sept ans en appel, comme pour donner un semblant de légalité à cette mascarade.

Prison de Bousaâda, mai 2024 : son corps, brisé par les sévices, est évacué d’urgence. L’image est forte, trop forte. Elle rappelle que derrière les discours lénifiants sur « l’unité nationale », l’Algérie pratique une politique de la matraque et des chaînes. Amnesty International, Human Rights Watch, tant d’autres ont documenté cette répression. En vain.

La libération de Younes Bounadi ne saurait masquer une réalité plus sombre : la Kabylie est aujourd’hui une terre assiégée. Sous Tebboune, la répression a pris des allures de croisade : manifestations interdites, drapeaux amazighs et kabyles saisis, chants traditionnels criminalisés, cafés littéraires bannis. Le lexique du pouvoir est sans équivoque : « terrorisme », « séparatisme », « atteinte à la sûreté de l’État ». Autant de termes vides qui servent à justifier l’injustifiable.

Et pourtant, malgré les balles réelles, les arrestations arbitraires, les procès expéditifs, la Kabylie résiste. Elle résiste comme elle l’a toujours fait, depuis les soulèvements de 1963, depuis le Printemps Noir de 2001, depuis ces nuits d’août 2021 où les flammes allumées par des mains criminelles ont dévoré ses forêts et ses fils.

La liberté de Younes Bounadi est un symbole, certes. Mais que pèse un symbole face aux centaines de détenus politiques kabyles qui croupissent encore dans les geôles d’Alger, de Blida, de Tizi-Ouzou ? Que vaut une libération quand des militants comme Chérif Mellal, Wafia Tedjani, Madjid Aggad, Mira Mokhnache, Khoudir Bouchelaghem, Mouloud Djabella ou tant d’autres symboles, paient de leur liberté leur attachement à leur identité ?

Le monde doit cesser de feindre l’ignorance. La communauté internationale, si prompte à s’émouvoir des droits de l’homme ailleurs, ne peut continuer à détourner le regard. Il est temps :

Younes Bounadi est libre. Mais sa liberté sera amère tant que la Kabylie entière ne l’est pas. Son combat ne s’arrête pas aux portes de sa prison ; il rejoint celui de tous ces héros qui, des montagnes aux villes, continuent de clamer : « Taqvaylit tezwar ayen yellan » (« La Kabylie d’abord, avant tout »).

La libération d’un homme n’est pas la fin d’une lutte, mais un rappel : l’espoir est têtu, et la Kabylie, plus encore. L’histoire jugera ceux qui, aujourd’hui, ferment les yeux. Mais elle honorera ceux qui, comme Younes, auront tenu debout.

Boualem Afir.

Vive la Kabylie libre et indépendante.

SIWEL 051932 JUIL 25

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