CONTRIBUTION (SIWEL) — Dans cette contribution, Salem At SEYD, repart sur des périodes de l’Histoire de la Kabylie. Il explique que si dans le passé, l’Etat Kabyle s’est verticalisé à des moments propices, pour se défendre notamment, il s’apprête, avec l’impulsion du MAK-Anavad à se verticaliser de manière permanente. Une démarche « plus que nécessaires pour faire face à un village planétaire à la concurrence féroce »

 

En des temps troublés, trouver son chemin n’est pas chose aisée. Et pour savoir où l’on va, il faut regarder d’où on vient.

L’Etat kabyle existe déjà

L’Etat kabyle n’en déplaise à certains existe bel et bien. Les milles et une perles de la démocratie villageoise kabyle en témoignent. Comme par le passé, il est plus ou moins en sommeil. Et il s’éveille toujours de façon inattendue. Devant un péril majeur et imminent, cet Etat d’essence horizontale se verticalise de façon unitaire en un temps express. Le Géant du Djurjura est le père mythologique de la Nation kabyle. Mais ce que nous savons moins, c’est que le Gigantesque Djurjura avec ses milliers de villages n’est en fait rien d’autre que ce géant invisible qu’est l’Etat kabyle.

La verticalisation de l’Etat kabyle

Devant un péril majeur et moins immédiat, il met du temps à se verticaliser. Ce fut le cas entre 1857 et 1871. La Kabylie guette le moment propice pendant 13 longues années avant de verticaliser son Etat. La Kabylie vivra la première guerre de libération de son Histoire. L’attention de l’historien s’est portée sur les hommes, Moqrani le jeune et Cheikh Aheddad, mais très peu portée sur l’Etat kabyle

En 1869, plusieurs mois avant l’insurrection, la Kabylie procède aux élections des assemblées de villages. C’est l’acte I de la verticalisation. Avec les « aqaru n tadart », la Kabylie se dote de mille et une têtes. Elles se rangeront toutes derrière le plus déterminé à en finir avec l’humiliation coloniale. Politiquement, cet homme n’est autre que Mokrani. C’est l’acte II de la verticalisation. Et la verticalisation acte III, c’est cheikh Aheddad qui viendra apporter à Moqrani, l’autorité morale et religieuse. Et il s’en est fallu de peu que la Kabylie conserve sa souveraineté retrouvée en 1871 et 1872.

Des tentatives de verticalisation avortées

Il y a eu d’autres verticalisations de l’Etat kabyle. En 1956, lord du congrès de la Soummam. En 2001, avec le mouvement des arouchs. Mais ces verticalisations de l’Etat kabyle étaient vouées à l’échec. En adjoignant, l’Islam religion d’Etat et le jacobinisme français, 1962 a accouché d’un monstre. Un monstre qui n’en finit plus de mourir. En refusant de désigner les milles et une tête villageoises (les « aqaru »), « 2001 » accouchera d’une souris. Sans compter que ce mouvement a cru bon de se passer des « sages » et des « femmes ».

Une nouvelle forme de verticalisation de l’Etat ?

Une autre forme de verticalisation de l’Etat Kabyle a des chances de réussir. Cette verticalisation de l’Etat kabyle n’est rien d’autre que l’aboutissement d’un long travail depuis 15 ans. Le MAK, mouvement autonomiste puis uniquement indépendantiste, a travaillé et travaille encore pour verticaliser l’Etat kabyle. Il a fini récemment par se doter d’un gouvernement provisoire. L’Anavad n’est du point de vue de l’Histoire que la manifestation d’une verticalisation « institutionnalisée » de l’Etat kabyle. Ce n’est plus dans les « Tadart » que renaissent et poussent les milles et une tête pour porter l’idéal démocratique kabyle. Elles poussent au sein du mouvement lui-même. Finiront-elles par se confondre avec les « aqaru » de la Tadart ?

Mais pour réussir cette verticalisation, ces milles et une tête devront se ranger, tôt ou tard, derrière le plus déterminé à recouvrer la souveraineté de la Kabylie. Pour l’heure, la personne la plus déterminée semble être Ferhat MEHENNI. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il propose un vrai projet de refondation de l’Etat kabyle. Un projet en capacité de conférer d’ores et déjà aux kabyles, le rôle de véritable acteur politique sur la scène Nord-Africaine. Et c’est ce qui fait défaut, pour le moment, aux autres peuples amazighs. Excepté, les Neffussa qui sont redevenus des acteurs politiques incontournables sur la scène libyenne en 2011.

La nécessité d’un « Aqaru national »

Pour réussir cette verticalisation de l’Etat, l’Aqaru national tout comme Moqrani, devra respecter quelques règles. Respecter la démocratie fondamentale des kabyles. Notamment, la dynamique parlementaire de l’Etat Kabyle. Une dynamique présente au niveau de la Tadart et des Aarchs. Il devra respecter une laïcité absolue. Donc respecter toutes les croyances, y compris l’Islam kabyle et l’athéisme. Il devra aussi gouverner avec fermeté devant un Etat algérien machiavélique, sans pitié et qui s’est refondé sur la « haine du kabyle ». Il devra veiller à ce que les fonctions régaliennes de l’Etat et rien qu’elles se verticalisent (Exécutif, Défense, Justice, Sécurité intérieure…) en harmonie avec les fonctions horizontales qu’assume parfaitement le modèle d’Etat kabyle. Car l’Etat kabyle ne se satisfait pas des usines à gaz.

La « démocratie absolue »

Le modèle d’Etat kabyle est un modèle d’Etat minimaliste, mais d’une efficience telle que beaucoup de peuples voudront le copier. Il se centralise au besoin mais jamais inutilement. Excepté, les fonctions régaliennes de l’Etat, pour faire face aux périls qui menacent la Kabylie. De nos jours, plus que nécessaires pour faire face à un village planétaire à la concurrence féroce. Mais peu pourront l’amener au degré d’efficience dont les anciens de Kabylie l’ont doté. Ce subtil équilibre entre Autorité et Pouvoir dont seuls imgharen avaient le secret. Car c’est bien de cette distinction entre Autorité et Pouvoir, entre Droit et Devoir au niveau de chaque citoyen que l’Etat kabyle tire toute sa force. Et c’est cela qui garantit au citoyen kabyle ses libertés. C’est cet impératif de « démocratie absolue » qui fait que chaque citoyen kabyle incarne aussi l’Etat et se dévoue corps et âme pour la Kabylie. Aqaru n Tmurt devra prendre en compte cela pour incarner l’Etat à un niveau national et international. Il devra l’incarner avec à ses côtés des sages élus. Et ces sages ne sont autres que les parlementaires de l’Agraw national. Et si nous devions résumer en une devise l’Etat kabyle, ce serait par : « Agraw is Suprême »

Mais si l’Agraw veut demeurer suprême à tous les niveaux (Tadart, Aarch, National), il doit compter sur un « Aqaru » d’envergure, capable de servir la Kabylie et uniquement la Kabylie. Est-ce Ferhat Mehenni qui rentrera dans l’Histoire en voulant servir la Kabylie ? Et bien, ça c’est au vent de l’Histoire d’en décider. Mais quand on sait d’où on vient, on sait où l’on va. Jadis si les seigneurs de Koukou l’avaient compris, ils auraient eu raison des turcs.

Etre des acteurs politiques kabyles

Et pour les esprits chagrins, nous dirons que tout comme pour le Général De Gaulle à 67 ans, nous voyons mal Dda Ferhat commencer une carrière de dictateur à bientôt l’âge de 66 ans. Nous n’avons plus besoin de nostalgique de 63-65. Nous n’avons plus besoin de culturalistes. Qui participeront aux élections législatives d’un pays arabe et serviront des intérêts arabes. Quant aux kabyles, il serait temps qu’ils se remettent à croire dans leur Etat ancestral. Car personne ne le fera à leur place. Il serait temps qu’ils se retroussent toutes et tous sérieusement les manches pour recouvrer leur souveraineté perdue. La Kabylie a besoin d’acteurs politiques kabyles et uniquement kabyles. Nous voulons bien conjuguer le « Why Not » mais nous sommes kabyles et nous voulons une République Kabyle !

Salem AT SEYD
SIWEL 210006 NOV 16

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