S’arracher à l’Algérie : une urgence vitale

La politique génocidaire déployée contre le peuple kabyle n’est pas une hypothèse : elle est aujourd’hui intégrée, redoutée et vécue par une écrasante majorité des Kabyles. Cette tragédie, à elle seule, devrait sceller une rupture irréfragable avec l’État algérien. Et pourtant, certains persistent dans l’aveuglement, la surdité et le mutisme. À ceux-là, il est impératif de rappeler le degré de décomposition avancée du système sociopolitique et sécuritaire algérien.
Ailleurs, j’ai écrit : « Ce système fonctionne, depuis sa naissance, sur la base d’une danse macabre de ses clans constitutifs autour du pouvoir. » Cette formule demeure tristement actuelle. L’appareil d’État est gangrené par des rivalités claniques et des luttes d’influence, où seul l’intérêt personnel prime. Cependant, les loups ne se dévorent pas entre eux. Face aux peuples qu’ils dominent, et particulièrement le peuple kabyle, martyrisé et tyrannisé, ils s’unissent sans hésiter.
Les scandales de corruption, de plus en plus exposés à mesure que la dance des clans s’intensifie, ne représentent que la partie émergée d’un iceberg. Du sommet à la base, toutes les strates du pouvoir portent la marque d’un régime corrompu, sans éthique, sans légitimité. Le népotisme et l’opacité en sont les principes de gouvernance, signes tangibles d’un État en décomposition, rongé jusqu’à ses fondations, jusqu’aux limites de la dislocation.
La santé d’un État repose sur la légitimité morale de ses dirigeants. En Algérie, cette légitimité a été confisquée dès le départ, sacrifiée sur l’autel du meurtre, de la violence, de l’usurpation du pouvoir et d’une indépendance confisquée. Les luttes intestines bloquent toute prise de décision, empêchent tout progrès, nourrissent la méfiance et précipitent l’effondrement. La stabilité apparente n’est qu’une illusion, maintenue au prix du sang, celui, notamment, du peuple kabyle, éternel bouc émissaire d’un régime aux abois.
Ce pourrissement n’est pas un simple dysfonctionnement, susceptible de correction, d’amélioration. Il est l’essence même de ce régime. Ses dirigeants, accrochés au pouvoir comme des sangsues, sont les produits d’un système né du crime et maintenu par le crime. Il ne s’agit pas de mauvaise gestion, mais bien d’une structure mafieuse, totalitaire, criminelle, qui fait écho au drame shakespearien et à cette réplique célèbre de Hamlet : « Il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark. » Sauf qu’ici, tout est pourri dans le système socio-politique. Et ce pourrissement représente une menace existentielle pour toutes les populations, mais de façon plus dramatique, plus systémique, pour le peuple kabyle, ciblé par une politique d’effacement.
Je reviens aux aveugles, aux sourds, aux muets, à ceux qui, par confort, peur ou servilité, persistent à perpétuer l’illusion d’une métamorphose du système sociopolitique algérien. Ils ne semblent pas comprendre la marche de l’histoire vers « Être ou ne pas Être ». Je les invite, au moins, à renifler l’odeur nauséabonde qui se dégage de la putréfaction de ce corps malade qu’ils cherchent à sauver bien qu’il les méprise. Leur posture trahit une inversion des valeurs, une perversion du jugement, une naïveté intellectuelle, ou pire, une malhonnêteté qui confine au mépris de soi. Leur discours, souvent habillé d’une fausse lucidité, finit par culpabiliser le peuple kabyle lui-même, comme s’il était complice de sa propre tragédie.
Ceux-là, dans leur passivité ou leur trahison, deviennent les relais d’une entreprise génocidaire. Ils parient sur une régulation institutionnelle qui n’adviendra pas, ou trop tard. Leur silence, leur attentisme, leur conformisme, sont autant de menaces pour un peuple que le régime veut faire disparaître.
S’arracher à l’Algérie n’est pas seulement un choix politique. C’est une urgence vitale.
Exil. le 10 Octobre 2025
Raveh Urahmun