KABYLIE (SIWEL) — Le décès de Hocine Ait Ahmed a semé un profond sentiment de révolte en Kabylie. Quel gâchis ! L’Homme le plus apte et le plus légitime à prendre la tête de l’Algérie n’a eu que répression et calomnie de la part de l’Algérie officielle.
Le vote de la Loi de Finance de 2016 qui instaure une politique d’austérité majeure s’est faite ressentir dès le 1er janvier 2016 par les ménages.
Les préparatifs pour le congrès du MAK qui avance à grands pas dans son projet de création d’un parlement kabyle ainsi que les victoires diplomatiques inattendues de l’Anavad ont semé un vent de panique chez les Bouteflika.
Le pouvoir algérien a voulu étouffer tous ces sujets et assommer la Kabylie en annonçant l’officialisation de Tamazight. Sauf que les quelques kabyles qui aspiraient encore à cette officialisation vont vite déchanter. En voici quelques raisons :
L’officialisation de Tamazight a été le cheval de bataille de plusieurs générations de kabyles. Mais jamais cette revendication n’a été avancée sans d’autres revendications tout aussi fondamentales : la Laïcité, la Démocratie et les Droits de l’Homme. Quel amazigh (Homme libre) digne de ce nom peut se reconnaître dans une dictature arabo-berbero-baathiste ? C’est une souillure pour Tamazight !
A travers l’officialisation de Tamazight, l’Etat Algérien s’engage à prendre en charge cette langue et créer les institutions qui vont la promouvoir. C’est le clan Bouteflika qui a préféré assassiner 128 jeunes kabyles en 2001 que d’officialiser Tamazight. C’est ce même clan Bouteflika qui s’engage à promouvoir cette même langue alors qu’il n’a envoyé aucun responsable ni aucun gendarme en prison pour ces 128 assassinats.
Ce même clan Bouteflika qui était prêt à nous tuer il y a à peine 15 ans, vient, subitement, sans qu’aucune ligne n’ait bougé dans sa politique contre la Kabylie, d’officialiser Tamazight. Quel kabyle un minimum lucide peut croire en ce plan maléfique ?
Bouteflika est gravement malade. La constitution algérienne, via son article 88, exige sa destitution. Au lieu de cela, on a vu tous les représentants de l’Etat algérien (et de sa constitution donc) se rassembler pour la réélection d’un président qui ne peut même pas aller aux toilettes tout seul. Ces mêmes représentants lui ont permis de changer cette constitution pour lui permettre d’être élu plus de 2 fois.
Ce sont ces mêmes représentants qui viennent d’écrire dans cette même constitution torchon, dans un article Bis, que tamazight est une langue officielle. De qui se moque-t-on ?
Le Gouvernement Provisoire Kabyle, l’Anavad, sillonne les pays afin d’internationaliser la cause kabyle. Il y arrive très bien.
Le Maroc, lors de la célébration du 70ème anniversaire de l’ONU, a défendu le droit du peuple kabyle à son autodétermination, après qu’un représentant algérien ait défendu le Polisario. Cette intervention du Maroc en faveur de la Kabylie a semé un vent de panique chez les Bouteflika.
En effet, l’Algérie a compris que si un ou deux autres pays se joignent au Maroc pour soutenir la Kabylie, cela accélérera en exponentiel l’avènement de l’indépendance du Pays Kabyle.
L’officialisation de Tamazight est un bouclier algérien contre les assauts des prôneurs des droits des peuples sur la scène internationale. Quiconque évoquera le droit du peuple kabyle à son autodétermination aura droit à un exposé algérien sur le respect des droits du peuple kabyle : Tamazight bénéficie d’une chaîne de télé, d’une intégration à l’école et maintenant d’une officialisation.
Tamazight bénéficie d’une chaine de télé, d’une intégration à l’école et maintenant d’une officialisation. Ça c’est sur le papier. Dans les faits la télévision en tamazight ne sert qu’à promouvoir, en kabyle et non en arabe uniquement, la dictature algérienne et à prôner l’islamisme.
Que de plus dégradant à tamazight que de la proposer à l’école en 4ème langue, facultative et/ou sans coefficient ? Les élèves qui ont développé cette image dégradante et ennuyeuse de ce « cours de tamazight » vont-ils vouloir sortir dans la rue pour une quelconque revendication amazighe ?
Tamazight langue officielle va patauger dans d’interminables débats sur la transcription, la standardisation et ne sera ni prête ni acceptée par les peuples amazighs. Il y a même danger à ce que cela crée des désaccords profonds entre les peuples amazighs eux-mêmes dans le cas où ces derniers acceptent de jouer à ce jeu de création d’une langue commune.
Pendant ce temps, la nouvelle constitution a prévu le renforcement de l’arabisation des institutions et des universités, à travers la généralisation de la langue arabe aux domaines techniques et scientifiques. Le but étant que dans quelques mois le processus d’arabisation, initié il y a 54 ans, atteigne totalement ses objectifs.
Lors de la conférence de presse d’Ouyahia sur l’avant-projet de la constitution, il a dit lui-même que les langues kabyle, chaoui et touareg ne sont pas le Tamazight. « Tamazight, il faut la créer », a-t-il dit. Et il a raison. Tamazight n’existe plus qu’à travers les langues auxquelles elle a donné naissance : Taqbaylit, Tacawit, Tacenwit, Tatergit, Tarifit, Tacelhit. Tout comme le latin, qui n’est plus utilisé, a donné naissance au français, l’espagnol, l’italien etc. Et chacune de ces langues constitue un moyen unique de véhiculer une culture qui lui est propre.
Si on essaye de créer une langue amazighe (la fameuse standardisation) à partir de toutes les langues d’origine amazighe, on produira une langue qu’aucun amazigh ne comprendra. Et cela sera une langue superficielle et vidée de son âme. Car une langue ce ne sont pas que des injonctions, c’est aussi et surtout un fond culturel cohérent.
Ajouté à cela, l’officialisation de Tamazight ne veut pas dire qu’on va pouvoir parler en kabyle à un policier, devant une administration ou toute autre institution algérienne. Taqbaylit n’est pas tamazight selon cette constitution. Tamazight encore une fois est à créer …
Pour toutes ces raisons et d’autres encore, la revendication « Tamazight langue officielle » est des plus ringardes en 2016. Ceux qui ont continué à revendiquer ce statut au 21ème siècle sont souvent animés par une nostalgie pour le mouvement 80. La jeunesse kabyle a quant à elle grandi dans le massacre de 2001 qui s’est terminé par un divorce consumé entre la Kabylie et l’Algérie.
Cette officialisation d’une langue OVNI dans une constitution torchon malmenée par un Etat dictature ne concerne pas les militants d’une Kabylie souveraine. Une Kabylie où Taqbaylit de nos ancêtres sera la seule et unique langue officielle. Taqbaylit, l’unique langue pour nos bonheurs et nos malheurs, nos rêves et nos aspirations. L’unique langue d’un Etat, constitué par des femmes et des hommes kabyles, qui seront les seuls capables de lui donner tout l’espace et tous les moyens nécessaires à son émancipation au quotidien.
SIWEL 071309 JAN 16