Adrar At Qdi3a (SIWEL) — M. Bouaziz Aît-Chebib, Président du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) et deux de ses collaborateurs, en l’occurrence MM. Hocine Azem et Mouloud Hamrani, qui sont respectivement Secrétaire National aux Relations Extérieures (SNRE) et Président du Conseil Universitaire de Tizi-Ouzou (CUTO) ont grandement et vaillamment « joué » du verbe politique hier à Aghrib, plus exactement à Adrar At Qdi3a (Adrar At Koudia), village aux 56 Martyrs de la révolution de Novembre 1954.

 

Notons d’emblée que dans le seul souci de répondre à « une gâterie » démocratique, ce meeting s’est poursuivi en se transformant carrément en une conférence. Et à travers celle-ci, les représentants du MAK ont convaincu les plus pessimistes parmi l’assistance que la seule voie qui reste au peuple kabyle pour échapper à son génocide programmé est son autodétermination.

S’agissant du meeting proprement dit, son coup d’envoi a été traduit par l’observation d’une minute de silence à la mémoire des Martyrs. Ensuite, Bouaziz Aït-Chebib prendra la parole dédier la rencontre à la mémoire de la défunte Cherifa. A ce sujet, le Président du MAK rappellera ô combien un Kabyle quel que soit son rang, est toujours inconsidéré par le régime d’Alger qui s’est toujours nourri de l’idéologie arabo-islamiste.

Après avoir souligné l’indifférence insultante du pouvoir à l’endroit de la défunte artiste, le Président du MAK donnera un aperçu sur le combat et l’apport de Youcer Oukaci, l’enfant de la région. « C’est la fraternité qui construit les civilisations et les nations ; Et nous ici pour vous apporter un message de fraternité », lancera aussitôt l’orateur pour comparer ensuite le peuple kabyle à un arbre dont les branches « sont séparées les unes des autres mais qui demeurent unies par le tronc ».

A travers une multitude d’exemples de faits historiques, Bouaziz Aït-Chebib démontrera l’unicité du peuple kabyle. Le président du MAK soulignera également, à travers des données historiques, que ce sont toujours les Kabyles qui ont créé et nourri les mouvements et actions indépendantistes algériens vis-à-vis de la France. « C’est bien Mohamed Djaffal, natif d’Irdjène, qui a été à la tête de l’Etoile Nord Africaine (ENA) après sa création et c’est bien Amar Imache qui a été son secrétaire général », a souligné l’orateur avant de donner une autre réalité prouvée par une donnée chiffrée : Sur les 14.000 membres du Mouvement national, 11. 000 d’entre eux sont kabyles.

Dans ce même discours, Bouaziz Aït-Chebib mettra en avant une réalité indiscutable, à savoir le rejet total du Kabyle par l’Arabe. Et pour mieux résumer cette réalité qui ne date pas d’aujourd’hui, le Président du MAK citera l’anecdote qui, de nos jours,, constitue une référence en matière d’histoire : En 1949, Hocine Aït-Ahmed s’est adressé à Mohamed Belouizdad en ces termes : « Nous autres les Kabyles, nous préférons une Algérie arabe plutôt qu’une Algérie française alors que vous autres Arabes, vous préférez une Algérie française plutôt qu’une Algérie amazighe ! ». Par ailleurs, fort de ses bagages de l’histoire, Bouaziz Aît-Chebib a porté à la connaissance de l’assistance les instructions reçues par Messali Hadj de son maître-penseur, Chakib Arslane d’où l’attitude fort négative de celui-ci vis-à-vis du Kabyle.
Et de fil en aiguille, le Président du MAK remontera jusqu’aux événements sanglants de 2001 en Kabylie en passant par ceux de 1963, le Printemps 1980, la grève du cartable de 1994 où « l’absence de réaction des autres Algériens était due au simple fait que les Kabyles étaient vus comme un peuple à part entière ». « Cela démontrait d’une façon, on ne peut plus claire, que les autres Algériens ne partageaient aucunement les valeurs du peuple Kabyle », a expliqué encore l’orateur.

Poursuivant son plaidoyer selon lequel l’Algérie est un territoire « habité par plusieurs peuples et que cette appellation « Algérie » est l’œuvre d’un général français dont le nom est Schneider, le Président du MAK a martelé qu’il n’y a à présent que certains Kabyles qui, à leur tort, pensent tous les Algériens ne forment qu’un seul peuple.
L’orateur poursuivra son discours en mettant en avant des arguments selon lesquels « non seulement la destinée de la Kabylie ne peut être qu’entre les mains de ses enfants mais aussi, le peuple kabyle, à défaut de la création de son propre Etat disparaîtra, car le régime dictatorial et corrompu d’Alger « est en train de mener une politique génocidaire vis-à-vis du peuple kabyle ». « Nous sommes aujourd’hui devant une alternative, a crié le Président du MAK, un : nous arrachons notre autodétermination, deux : ou nous disparaîtrons ».

Abordant ensuite le volet portant sur les mœurs politiques du régime d’Alger et sur le point relatif aux élections présidentielles du 17 avril, Bouaziz Aït-Chebib déclarera qu’en réalité, il n’y a pas de lutte de clans au pouvoir. « Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Ouyahia, Ali Benflis et tant d’autres personnages du sérail sont tous sous la houlette du DRS (Département du renseignement et de la Sécurité) », précisera l’orateur avant de prouver le bien-fondé de sa thèse : « Ali Benflis a bel et bien déclaré qu’il avait confiance en la personne du Général Gaïd Salah et non en Bouteflika ». « N’est-ce pas, ajoute Bouaziz Aït-Chebib que cela prouve que « le conflit entre les clans de pouvoir » n’est qu’une mis en scène pour tromper l’opinion ? ». « Si c’était vrai l’existence de clans qui s’affrontaient, poursuit l’orateur, on ne trouverait sans doute pas les satellites du DRS comme le FCE (Forum des chefs d’entreprises), l’UGTA (union générale des travailleurs algériens), Amar Ghoul, Amara Benyounès, Ahmed Ouyahia aux côtés de Bouteflika ». « Il faut comprendre que Bouteflika est le candidat du DRS », signale encore Bouaziz Aït-Chebib avant d’ avertir l’assistance de se méfier de ceux qui lancent des dithyrambes à l’endroit des Kabyles qu’à l’occasion des élections.
Sur ce dernier point, l’orateur dira également que « la seule crainte du pouvoir est l’abstention de vote le jour « J » car cela discréditera d’une façon flagrante vis-à-vis de la communauté internationale ». « Aussi, je lance, encore un appel à l’endroit du peuple kabyle d’ignorer l’urne le 17 avril car la seule élection à laquelle nous tenons et que nous revendiquons est celle portant sur le référendum sur l’autodétermination de la Kabylie », a clamé Bouaziz Aït-Chebib avant de lancer un second appel dont celui-ci porte sur la marche du 20 avril, à l’occasion du 34e anniversaire du Printemps 1980 où il sera l’occasion de revendiquer à cor et à cri l’autodétermination du peuple kabyle.

Sur ce, le Président du MAK pose le micro lequel est repris par Hocine Azem. Le Secrétaire national aux relations extérieures du MAK ne fera pas dans la dentelle lui aussi en cassant les tabous. Hocine Azem parlera crûment de la guerre opposant les Arabes aux Kabyles et qui ne date pas d’aujourd’hui. Selon le SNRE du MAK, l’élimination d’Abane Ramdane, du colonel de l’ALN, Ali Mellah, la séquestration du cadavre du colonel Amirouche, les assassinats de Krim Belkacem, Ali Mecelli et les attaques meurtrières perpétrées contre les membres du GPRA d’origine kabyle, sont les preuves indiscutables de cette guerre contre le Kabyle.
L’orateur mettra l’accent également sur les tueries commises contre les éléments du FFS en 1963 au nom de l’arabo-islamisme et surtout le refus de l’APN de les reconnaître comme des Martyrs « alors que cette même institution a réhabilité les terroristes et leur a même accordés des avantages matériels et moraux ».

Hocine Azem expliquera également la politique génocidaire menée par le pouvoir contre le peuple kabyle, et ce en ciblant directement sa langue et sa culture à travers l’école, les médias, les crèches et tant d’autres supports véhiculant des idées. L’intervenant ne passera pas sous silence l’accord entre la France et l’Algérie quant à la construction d’une université à Tlemcen alors qu’en Kabylie, l’accord a porté sur l’exploitation de gaz de schiste qui nuira à la santé humaine et animale et qui serait une véritable catastrophe écologique si ce projet venait à être accepté par la Kabylie.

Selon le SNRE du MAK, le pouvoir d’Alger, en sus de sa politique de destruction matérielle de la Kabylie, cible aussi l’effacement des repères identitaires et culturelles de la mémoire collective. « Le discernement du titre d’Honoris causa à Ahmed Ben Bella par les universités dont celle baptisée au nom de Mouloud Mammeri rentre dans le cadre de cette politique d’anéantissement de la mémoire collective kabyle », a martelé Hocine Azem.

En ce qui le concerne, le Président du Conseil Universitaire MAK de Tizi-Ouzou mettra l’accent sur le péril attendant la Kabylie si elle ne réagit pas dès maintenant. Et au même temps, Mouloud Hamrani a joué sur la fibre sentimentale pour susciter la réaction patriotique. Dans ce sens, l’orateur citera d’abord le père de la relativité, feu Albert Einstein : « Chaque lâcheté crée un lot de morts ». « Aujourd’hui, nous nous retrouver devant une alternative : mener un combat pour notre souveraineté ou nous serons exterminés », assure le président du CUMAK de Tizi-Ouzou d’expliciter : « L’extermination se traduit par l’éteinte de la fierté ».

Plus loin, l’intervenant expliquera le phénomène de déculturation frappant de plein fouet la Kabylie et faisant continuellement des pas de géant. Mouloud Hamrani a cité l’exemple de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou « qui, par la faute du pouvoir politique d’Alger qu’elle subit, ne produit plus des penseurs, des intelligences et des projets politiques ».
L’orateur mettra fin à son intervention par cette pique : « Il n’est pas facile d’arracher sa liberté et il n’est pas facile non plus de vivre sans liberté ».

Nous devons rappeler qu’initialement, le rendez-vous avec les braves villageois d’Adrar-Oukhai devait être clos avec la dernière intervention de Mouloud Hamrani. Cependant, vu l’insistance de certains éléments de l’assistance à intervenir « puisque la démocratie n’exclut pas le débat », la rencontre se poursuivit et au lieu de la poursuite du meeting, une conférence lui succéda. « Au MAK, nous ne fuyons jamais un débat », a clamé Bouaziz Aït-Chebib. C’est ainsi que le premier intervenant – son appartenance politique oblige – a passé à l’assaut.

Au lieu d’une question, le jeune homme, à la mine certes, sympathique, s’est lancé dans une véritable plaidoirie où le MAK est décrit comme une « organisation qui fait sans le vouloir le jeu des puissances étrangères, américaines et juives notamment, et que cela fait encourir à l’Algérie le risque de subir la « tragédie du Soudan, et certains autres pays comme l’ex-Yougouslavie ». selon cet intervenant, le plan GMO (grand Moyen-Orient) élaboré et mis en application par les Américains en 2001 est toujours menaçant. Selon ce jeune homme, même la France aurait accepté d’être la complice du MAK pour nuire à l’unité du peuple algérien. « Ce que subit la Kabylie est subi par toutes les régions du pays et, par conséquent, il y a lieu plutôt de mener une lutte contre le pouvoir qui est honni par tous les Algériens », a suggéré ce jeune homme qui n’a pas manqué aussi d’ exhiber un document qu’il a appelé « Charte du MAK » et qui n’est en réalité qu’un document fait par un simple citoyen dont le souci était de le proposer au public pour son enrichissement. La contenance du mot « dieux » dans le document a suscité frustrations – réelles ou supposées – En tout cas, il a été « interprété » comme une offense à l’islam puisque « Dieu » est unique. Une connaissance des textes religieux et le français académique renseignent que « lorsque, « dieu » dont la lettre « D » commence avec une minuscule, on peut mettre le mot au pluriel en lui ajoutant la lettre « X » et que cela ne constitue nullement un blasphème car des représentations peuvent être interprétées comme telles ; Ce qui n’est pas le cas quant il question de l’Unique. Quand il s’agit effectivement du Créateur le mot commence par une majuscule, à savoir « Dieu ». Un autre intervenant a voulu savoir quelle place sera réservée à l’islam dans l’autodétermination de la Kabylie « puisqu’ il apparaît qu’au MAK, on ne manifeste pas des signes de respect à l’endroit de l’Islam » ? Cette même jeune personne a voulu savoir qu’est-ce qui retient Ferhat M’henni en France sinon « son admiration pour ce pays ? » Pour dire vrai, ces deux intervenants ont fait dans la diatribe contre le MAK au lieu de poser des questions sur des points non très bien compris.
Bouaziz Aït-Chebib, calme et serein car, après tout, plus politisé et plus connaisseur des dossiers relevant de la géopolitique et de la géostratégie que les deux intervenants, partisans de « l’Algérie, une et indivisible » et de son « appartenance au monde arabo-musulman », reprit le micro pour se lancer ensuite dans un discours à travers lequel il établira une vérité. Le président du MAK sera prolixe dans son intervention que voici : « A quel moment donc, le MAK a empêché les autres régions de l’Algérie de se soulever pour demander au pouvoir réparation ? Est-ce parce que les autres Algériens ne veulent pas lutter que nous autres Kabyles sommes tenus à l’inertie et subir l’iniquité ? Le peuple Kabyle voit la menace peser sur lui et décide de réagir ; ce qui relève de l’ordre naturel des choses. N’oublions pas que la Kabylie, en plus de l’ostracisme économique, subit une politique de dépersonnalisation contrairement aux autres régions qui adhèrent à l’idéologie arabo-musulmane du pouvoir algérien. La Kabylie s’est trop sacrifiée pour l’Algérie pour ne récolter que mépris , déni d’existence, répression dans le sans et ceci dans l’indifférence totale du reste des Algériens. S’agissant du Soudan, plus exactement le sud du Soudan, auquel tu reproches la chrétienté de ses habitants, est-ce parce que les Sud-Soudanais sont chrétiens qu’il faut taire leur droit à la dignité et à la liberté ? Quant aux Républiques de l’ex-Yougouslavie, que les déchirements survenus dans ces territoires n’avaient rien de confessionnels et ils avaient pour origine l’existence de plusieurs peuples et non de groupes ethniques comme certains tentent de le faire. Ces peuples ont été soumis de force à la dictature communiste de la Yougoslavie et ont fini par s’ y émanciper et établir leurs propres Etats.

S’agissant de la place de l’islam, dans la Kabylie autodéterminée, sachez que le MAK n’a aucun problème avec les religions qu’il respecte en luttant pour la liberté de culte et la liberté de conscience. En effet, avec l’instauration de la laïcité, l’islam, à l’instar des autres religions et croyances, sera mis à l’abri du politique.

Concernant cette « Charte », il faut savoir que le MAK n’assure pas sa paternité puisqu’ elle a été élaborée par un simple citoyen dont l’intention est tout simplement de la soumettre au public pour l’enrichir. Ce citoyen a au moins ce réflexe de proposer quelque chose. En revanche, ce que je trouve de désolant chez-vous, c’est votre intérêt excessif à ce document qui, dois-je le rappeler, n’est pas du MAK alors que vous ne manifestez aucune réaction à l’exploitation du gaz de schiste que la France s’apprête, avec la complicité du pouvoir d’Alger, à exploiter sur les côtes de Béjaia. François Hollande en personne que moi j’appelle « François Arabie » a déclaré publiquement aux Français que durant son mandat, il n’acceptera jamais l’exploitation de gaz de schiste sur le sol français. François Hollande qui est raciste envers les Kabyles a accepté de réaliser en Kabylie ce qu’il interdit en France. Cela ne semble pas vous déranger. Quelle tristesse ! La Kabylie, dois-je encore rappeler, n’est pas aimée de la France. Et pour tout dire, le MAK ne s’est compromis avec personne ni avec une quelconque puissance étrangère. Ce que je tiens aussi à remarquer car cela me fait terriblement mal au cœur est dans l’esprit de certains, dès qu’un Kabyle manifeste un esprit d’initiative, il est taxé « d’agent à la solde d’une puissance occidentale ». A croire que les Kabyles sont des mineurs à vie ou des gens incapables de réfléchir. Eh bien sachez que le MAK est jaloux de sa liberté et tient surtout à préserver sa fierté pour accepter une quelconque ignominie. Ce que nous avons accompli, c’est nous qui l’avons réfléchi et conçu. Nous sommes capables de réfléchir comme tous les autres peuples du monde et nous irons toujours dans le sens de notre libération. S’agissant de la question ayant trait à Ferhat M’henni, il faut savoir que la France lui a refusé un asile politique. Cette même France, a été complice du pouvoir algérien dans l’assassinat de son fils. Pourquoi, il n’est pas encore rentré en Algérie. Ferhat M’henni n’est pas encore rentré en Algérie pour la simple raison le mandat d’arrêt signée contre lui par la justice algérienne après qu’il ait décidé de tenir une conférence à l’université de Bouira lui pèse sur la tête comme l’Epée de Damoclès. Toujours est-il cependant que même si Ferhat M’henni n’est pas là, il faut reconnaître que le MAK poursuit toujours sa mission. S’agissant enfin de la grève du cartable de 1994 où vous semblez apporter des accusations contre Ferhat M’henni, il faut savoir que c’est cette grève du cartable qui est à l’origine de l’enseignement de tamazight à l’école et de la diffusion des programmes en tamazight à la télévision. Je profite de ma présence ici pour dire que je rends un hommage aux enfants du boycott. Je tiens enfin à souligner que, contrairement à certains, Ferhat M’henni a su éduquer et assurer un enseignement aux générations qui sont arrivées après lui. La preuve est bien visible de nos jours. Lui en France et nous ici, le MAK s’acquitte formidablement de ses missions ».

A la fin de son intervention, le Président du MAK a été « récompensé » par des ovations de l’assistance qui est convaincue par ses explications et celles de Hocine Azem et Mouloud Hamrani qui ont également apporté des réponses aux interrogations posées. En définitive, le rendez-vous d’Aghrib a été chaud mais ô combien bénéfique pour la Kabylie.

Siwel avec Tamurt

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