CHRONIQUE (SIWEL) —Toi. Longtemps, je t’ai posé précieusement sur ma tête. Mon souhait était celui de me rassurer un tant soit peu, que sous son ombre couvait l’espoir de voir mon peuple se lever comme un seul homme pour sa liberté. J’espérais irriguer mon cœur d’un sang frais et vigoureux, inaltérable et inoxydable. J’avais cette assurance, je ne pouvais douter de ce qui venait de toi, de ton verbe, de tous tes messages. Toi ! Oui, toi le Kabyle, que beaucoup vénèrent, toi, que presque toute la Kabylie regarde et attend quand l’orage se produit et vient ton souffle lui donner espoir. Toi le Kabyle ! Es-tu toujours Kabyle ?
La Kabylité pour laquelle nous avons et nous continuons à nous battre, elle-même frissonne et chancelle devant ta frilosité qui n’a guère de doute aujourd’hui. Oui, toi, un jour ton regard ira mourir sur une terre qui refusera sa fixation. Au piémont des montagnes, l’humidité le couvrira de honte, il ne sera plus celui qui a longtemps fait briller les yeux, mais celui que les yeux n’oseront plus voir.
Mais Pourquoi ? Quand on sait que le proverbe qui dit : « Yal wa d Taqbaylit-is –chacun sa kabylité- », est synonyme d’offense et non d’honneur. Continueras-tu, indéfiniment, à demeurer insensible aux cris nombreux de ceux et de celles qui, longtemps, ont cru à ton message ? Ton message n’était véritablement pas celui qui appelait le peuple kabyle à être fort et digne? À ne se forger que dans l’honneur, le respect et surtout dans le courage de ne jamais être modulable ?
Pourquoi donc ? Pourquoi, quand tout le peuple kabyle, attendait ton mot, si sage, disaient beaucoup d’entre nous, tu ne donnes enfin cette stature d’un « assimilationniste », que nous n’avions pas compris à temps. Continueras-tu finalement à ne saupoudrer de ta poussière tout œil qui voit que la Kabylité est mère de tout honneur, que la Kabylie est le socle de toute liberté, que la Kabylité doit se vivre dans l’âme, le cœur et l’existence, que la Kabylité n’est jamais assimilable au déshonneur de l’arabité qui, longtemps, ne chargeait que ce Kabyle de tout ce qui n’est pas de lui ni à lui.
Toi le Kabyle. Un jour viendra, tu te verras vidé de ta conscience, déplumé de tout ce qui faisait ta fausse carrure. Tu te verras interpellé, crûment, par ceux et celles qui étaient les siens, que jamais l’homme, n’est celui des complicités et des silences, mais le véritable homme, est celui qui demeure parmi les siens quelles que soient les circonstances.
Rachid Hitouche
SIWEL 201837 Feb 17