CONTRIBUTION (SIWEL) — Feu Matoub, paix a son âme, aimait à répéter que l’Algérie n’était pas arabe mais berbère. Beaucoup de militants de la cause kabyle le répètent à tort ou a raison. Il va de soi que l’Algérie, une création toute récente de la France coloniale, tout comme le reste de l’Afrique du nord, d’ailleurs, est historiquement berbère. Maintes fois colonisée, cette région d’Afrique n’a pas cessé de se transformer au gré de ces passages plus ou moins longs de populations venues d’ailleurs. Le substrat berbère y demeure intact, avec quelques éraflures à la surface, mais rien de grave.
La mutation véritable ne commence à s’opérer que depuis 1962 quand les gouvernements successifs, d’obédience arabo-musulmane, s’y employaient avec une hargne et un acharnement sans précédents. Le conflit palestinien à l’est et le Polisario à l’ouest servaient d’adjuvent pour drainer des foules plus ou moins incultes et appuyer des causes au demeurant très distinctes mais charriant l’arabe et l’islam comme dénominateur commun. A cela, ajoutons tous les conflits de par le monde auquel l’islam ou des pays arabes étaient conviés.
Dans la foulée, on construisait des mosquées à tour de bras, le discours véhément qui s’y tenait les vendredis éloignait l’assistance de son vécu misérable pour la rapprocher du Moyen-Orient, de ses conflits, de son islam, de la langue qu’on y parlait. Et justement, pour certains imams, parler la langue du coran est assimilé à une profession de foi et participait du djihad fi sabil Allah.
Les médias, à la solde du régime d’Alger, abondaient dans le même sens. L’Algérie s’enorgueillissait de sa spécificité comme pays arabe et musulman. Tout positionnement contraire pouvait attirer au contrevenant la foudre des mercenaires de la plume qui n’hésiteraient pas à le qualifier de traître à la patrie et, ô sacrilège, à l’islam ! Nous autres Kabyles, nous ne pouvons afficher notre kabylité sans être immédiatement assimilés aux harkis, forcément du hizb frança, et la main de l’étranger est vite brandie.
Pendant ce temps, et aujourd’hui plus que jamais, en Kabylie le combat n’est jamais abandonné, la chanson engagée est en vogue et un militantisme, linguistique et culturel travaille à un renouveau berbère en général et kabyle en particulier, la contestation gagne du terrain, la répression aussi… Et tout cela quand le reste de l’Algérie dort à poings fermés. S’amorce alors une bifurcation qui vite prend la forme d’un divorce qui sépare une Kabylie plus kabyle que jamais d’une ‘Algérie tour à tour palestinienne, arabe, musulmane, voire islamiste et terroriste ; une girouette qui tourne au gré des vents dominants soufflant depuis ces contrées lointaines embourbées dans des guerres de religions sans fin, puis, entre deux sommeils et avant de retourner se coucher, elle descend dans la rue pour gesticuler et bomber le torse pour des pépins palestiniens ou pour tout autre querelle dans laquelle l’islam se trouve impliqué.
Mais une chose est sure; Le reste de l’Algérie est réceptif a tous les discours politiques et médiatiques, manipulateurs de masses depuis l’indépendance à tel point que l’Algérien moyen est aujourd’hui plus royaliste que le roi, prompt à prendre faits et cause pour des querelles dont ils ignorent les tenants et aboutissants, juste parce qu’on l’a réglé a l’occasion sur le mode ON, voilà tout.
Dire que l’Algérie est berbère, n’a pratiquement plus de sens ou du moins il ne nous est d’aucune utilité. De même que Darwin ne ferait pas d’Adan et Eve des partisans de l’évolution, nous non plus, nous ne ferons pas d’un Abassi Madani, d’un Ali Belhadj, d’un Madani merzag des citoyens kabyles…. A quoi bon puisque nous en avons assez avec nos kabyles khwendjis et nos kabyles de service.
Aussi, l’idée qui consisterait à additionner du médiocre ne ferait-elle qu’empirer le problème car si nous sommes fiers d’être kabyles c’est parce que nous sommes un peuple a part, des Hommes libres et n’est KABYLE que celui qui dans sa tête souffle un vent de liberté.
Kaci MEZAA
SIWEL 151409 JAN 16