CONTRIBUTION (SIWEL) — Dans ce texte, signé par la rédaction de Siwel, on revient sur l’occultation de l’identité kabyle dans les médias algériens ou dans des sorties médiatiques où leurs auteurs expliquent que les kabyles sont des algériens, voir de très bons algériens mais ne sont par contre pas des kabyles. On passe ainsi de l’arabisation des amazighs à « l’algérianisation » des kabyles.

 

Quel est le point commun entre Amine Zaoui et le ministre algérien de la religion ? Pas grand-chose à première vue et pourtant, ils sont tous les deux d’accord sur au moins deux choses :
– La Kabylie est une référence en Algérie (en matière de culture pour l’un et de religion pour l’autre)
– Les Kabyles n’existent pas, il n’y a que des algériens.

Un tandem pour le moins inattendu, à qui on peut ajouter la presse algérienne.

Amine Zaoui, l’écrivain oranais :

Dans un entretien accordé au site depechedekabylie.com, Amine Zaoui tout en reconnaissant que la Kabylie est culturellement bien avancée par rapport aux régions algériennes et qu’elle doit être une référence pour les peuples d’Afrique du Nord, il ne cesse de répéter, dans chaque phrase, que la Kabylie serait algérienne et que les Kabyles n’existent pas en tant que kabyles, mais uniquement en tant qu’algériens.
Quelques expressions d’Amine Zaoui dans son court entretien : « Cette belle région d’Algérie », « Mes meilleurs lecteurs sont de cette région », « Le bon lecteur algérien est en Kabylie », « Les citoyens de la Kabylie », « Merci à mes lecteurs de Kabylie ».
Cela frise la caricature. Ça aurait été tellement plus naturel de parler de « lecteurs kabyles » mais l’idéologie a pris le dessus. Pour Amine Zaoui, et c’est flagrant, il n’y a pas d’identité kabyle. Pour lui, les Kabyles ne devraient plus s’identifier comme des kabyles, ce qu’ils font depuis des siècles, mais comme des « algériens de Kabylie » et la Kabylie ne serait, bien entendu, qu’une zone géographique comme il y en aurait dans tous les pays du monde.

Mohammed Aissa, Ministre algérien de la religion :

Dans un long entretien accordé au même journal, celui qui a envoyé Slimane Bouhafs en prison pour « délit de chrétienté », qui envoie des imams salafistes en Kabylie et qui y fait pousser des mosquées comme des champignons, parle de la Kabylie comme étant une référence en matière de pratique religieuse. Ce qu’il résume par cette image : « à supposer que l’Algérie serait une grande mosquée, son minaret serait alors sur les monts du Djurdjura ». C’est donc là le projet religieux de l’Algérie à destination de la seule région laïque de toute l’Afrique du Nord.
Dans ce long entretien, ce ministre algérien n’a à aucun moment parlé de « Kabyles » mais que de « algériens » de Kabylie, à 23 reprises. Il a réussi l’exploit de citer la Kabylie 11 fois sans avoir à parler de Kabyles, mais uniquement d’algériens.

À signaler, tout de même, que le ministre algérien de la religion, qui ne cesse d’exprimer son "amour" pour la Kabylie, a expliqué le fait que Tizi-Ouzou soit la wilaya qui contient le plus grand nombre de mosquées par le fait que la Kabylie soit « tellement peuplée ». La Kabylie est donc assez peuplée pour être quadrillée de mosquées, mais pas assez peuplée pour avoir des lieux de culture, de sport et de loisirs. C’est maintenant clair, le ridicule ne tue pas.

La presse algérienne, Madjid Boutemeur et At Boumessaoud :

Madjid Boutemeur, le génie franco-kabyle, était en lice pour le prix Nobel de Physique de 2016. Dans les nombreux articles qui lui ont été consacrés dans la presse algérienne, à aucun moment, on n’a rappelé son identité kabyle. Il y a même un site, dont le zèle anti-kabyle est connu de tous, qui a tenu à préciser dans chaque titre des 4 articles qu’il a consacré au physicien kabyle que ce dernier est algérien et non kabyle. Comment oser occulter l’identité kabyle d’un homme de renommée internationale et qui a adressé un message à Ferhat Mehenni, le Président de l’Anavad, pour souhaiter un « bon vent à la renaissance de la Nation Kabyle » ?

Le village kabyle At Boumessaoud, le village de Cherif Kheddam, a été désigné, lors d’un concours, comme étant le village le plus propre de Tizi-Ouzou. Cela a fait le tour des journaux algériens qui, pour la plupart, ont délibérément préféré parler de la wilaya de Tizi-Ouzou sans préciser que cela se passait en Kabylie. Néanmoins, le plus pathétique est sans doute ce passage d’un article de l’agence de presse officielle de l’Algérie qui présente Chérif Kheddam comme « un des monuments de la chanson algérienne d’expression Amazighe ». Cherif Kheddam serait tout sauf kabyle.

En Algérie, quand la presse, les religieux et des intellectuels se mettent d’accord, c’est donc pour faire de la Kabylie une entité plus algérienne que l’Algérie et pour dénier à l’identité kabyle jusqu’à son existence.

La rédaction
SIWEL 152126 OCT 16

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