MONTREAL (SIWEL) — Mas Lhacène Ziani, vice-président du Gouvernement provisoire kabyle en exil (Anavad) et ministre de la médiation, est revenu depuis ce printemps dans l’arène politico-artistique, après plusieurs hospitalisations et une période de convalescence de quelques semaines. Siwel publie ci-dessous l’entretien qu’il a accordé à Slimane Aweghlis en juin dernier
C’est avec un plaisir inexplicable que je salue la présence de la communauté kabyle à mes côtés durant tout ce périple de plus de 8 mois. En effet, elle me rassure à plus d’un titre à travers le soutien moral et matériel qu’elle m’a prodigué. Ce soutien de mes compatriotes est venu de Kabylie, de France, des USA et du Québec. Cela démontre une fois de plus que la solidarité kabyle est une valeur infaillible et que tous les espoirs sont permis. À l’hôpital, ce qui me remontait le plus furent les moments où l’on me chuchote à l’oreille : ‘’nous t’attendons pour continuer l’œuvre commune ».
L’immensité du nombre de visites que j’ai reçues m’a valu une considération toute particulière du personnel médical. La liste fut très longue et inénarrable. Parmi les plus connus, en plus de la famille Ziani, je citerai au moins le soutien quotidien de Mourad Itim et Amar Nessah, la venue de Paris de Malik Hasni, la surprise du chantre de la chanson kabyle Oulahlou et bien entendu du président Mehenni Ferhat.
Je salue tout particulièrement mes amis Said Lahcene ainsi que Djamila Adar et Karima B. qui m’ont organisé des événements artistiques émouvants en hommages.
Comment ne pas revenir sur scène avec toute cette chaleur humaine de mes compatriotes ?
Le contexte particulier de ces derniers mois semble d’un grand apport d’énergie pour ce grand retour ?
Vous l’avez dit, le contexte est pour une large part dans ce redémarrage. Ce dernier trimestre fut riche en événements marquants. Il y eut d’abord le 20 avril qui a amplement mobilisé tant au pays qu’en diaspora et dont je saisis l’occasion pour en féliciter tous les militants et sympathisants. Prendre la parole ce jour-là a aidé à me régénérer; ensuite, l’hommage que l’on a rendu, au mois de Mai à Montréal, au monument de la chanson kabyle, mon ami Kamal Hammadi, m’a inspiré au point de composer un poème sur sa personne et son œuvre que j’ai eu le plaisir de partager sur scène avec notre diaspora au Canada. J’ai également réapparu lors de la conférence que j’ai animée le 23 juin toujours à Montréal. Cette dernière valait pour tous les événements indélébiles de la mémoire kabyle à savoir : l’assassinat de Matoub Lounas le 25 juin 1998, la journée de la nation kabyle immortalisant la plus grande manifestation du monde ayant mobilisé 2 millions de Kabyles sur Alger le 14 juin 2001, l’assassinat de Améziane Mehenni à Paris le 19 juin 2004 et la création du GPK le 01 juin 2010.
Que prévoyez-vous pour maintenir ce rythme, M. Ziani ?
Encore un chapelet d’activités aussi importantes les unes que les autres ! Nous entreprenons de passer à la vitesse supérieure en proposant aux Kabyles un projet de parlement. Il s’agit d’un cadre de consultation qui permettra aux Kabyles de tous bords de se concerter sur l’avenir de leur pays en concevant notamment les textes fondamentaux qui régiront notre société et en mettant en place les institutions inhérentes. Le Président Ferhat Mehenni a annoncé récemment sur la place du Trocadéro son lancement officiel à Montréal pour la fin août-début septembre 2016.
D’autres projets tels que la cartographie de la Kabylie et le bureau des statistiques de cette dernière verront le jour parallèlement.
Pour faire face à cette nouvelle étape, j’entreprends avec mon chef de cabinet Mourad Itim une reconfiguration des structures de la diaspora kabyle en Amérique du Nord. Plusieurs réunions de travail sont prévues à cet effet. De nouvelles commissions et équipes de projets seront mises en place pour encadrer ce programme. Nous sommes déjà à pied d’œuvre. M. Mourad Itim, entreprend la préparation d’une série de conférences à travers l’Amérique du Nord au cours desquelles nous expliquerons notre programme annuel dont le grand projet de parlement. Dans la même optique Amar Nessah publiera une pléiade de vidéos.
Tout cela est revigorant, n’est-ce pas ?
Comment expliquez-vous l’acharnement des Kabyles de service dits KDS contre le mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie ?
Qui s’acharne contre l’autodétermination d’un peuple s’acharne contre ce peuple lui-même. Ces KDS méprisent tout simplement le peuple kabyle auxquels ils dénient le droit de s’affirmer. Également, la lâcheté fait qu’il est plus facile de piétiner sa propre famille que d’affronter ses ennemis. Le président Mehenni a tranché sur la question et disait à peu près ceci: la Kabylie est une immense mémoire qui retiendra autant ses amis que ses ennemis.
À propos, j’ai adoré une vidéo de quelques minutes dans laquelle la jeune chanteuse Malika Djenadi se demandait que peuvent bien gagner les KDS ? Effectivement ils sont détestés et bannis de leur famille et sont méprisés par l’ennemi. En Kabyle, on dit : ur tiffen di Rebbi ur farjen ideballen, ce qui signifie qu’ils ont manqué la grâce de Dieu et raté le spectacle des troubadours.
Un remaniement au sein du gouvernement a été annoncé il y a de cela quelques semaines, par le président du GPK. Doit-on s’attendre à des changements majeurs? De nouveaux rôles, de nouvelles figures ?
Nous venons de tenir notre troisième congrès. Et la raison d’être d’un congrès est d’apporter les changements qui s’imposent au contexte tant sur le plan de l’orientation que celui de l’organisation. D’ores et déjà, le président réélu du MAK, Bouaziz Ait Chebib, que je salue au passage pour son courage et ses efforts, a annoncé des changements importants publiés par l’agence Siwel.
Je suis persuadé effectivement que le remaniement de l’Anavad est imminent. J’aimerais préciser, à ce sujet, qu’un changement au sein d’un gouvernement se matérialise beaucoup plus à travers les orientations politiques et l’organisation des structures qu’au niveau des personnes. Plus simplement, les personnes doivent être désignées en fonction de la politique et non l’inverse. Dans cette optique, je m’attends à de nouveaux rôles. Des nouvelles figures, pourquoi pas ?
Dans le cas de l’Anavad, l’heure est à la concrétisation des objectifs et cela requiert un personnel opérationnel.
Dda Lhacène, dans votre positivisme, quel message voulez-vous lancer à notre jeunesse ?
Je suis fier de vous. Je salue votre courage et votre lucidité. Vous privilégiez la raison à la violence et c’est tout à votre honneur. Vous l’avez prouvé, entre autres, le 20 avril et lors de tous ces rassemblements de célébration que j’appelle ‘’Célébration de juin torride » qui témoigne des assassinats de Matoub Lounas et Mehenni Ameziane, de l’inégalable manifestation du 14 juin et de la création du GPK le premier juin.
Demeurez unis dans la fraternité. Ma génération a hâte de vous passer le flambeau !
SIWEL 022035 JUL 16