Contribution (SIWEL) – La lutte du peuple kabyle pour sa liberté a indéniablement suscité enthousiasme et espoir au sein de chaque kabyle épris de liberté et même au-delà. Mais elle a aussi fait naître des esprits naïfs voire sournois, et un ostracisme étatique d’une sévérité effrayante.

 

Les expériences des combats des peuples pour leur existence, nous ont appris et démontré que seule la volonté et la détermination du peuple comptent et l’avancée libératrice dépend essentiellement du degré de l’adhésion populaire à la lutte.

L’adhésion, quant à elle, dépend de deux éléments à savoir la crédibilité de la cause et de ceux qui la portent, ainsi que le sentiment d’appartenir à un destin commun. Ce dernier est de loin l’élément fondamental de toute nation qui aspire et veille à ce que son intégrité soit toujours inviolable.

Le destin commun d’une nation ou d’un peuple signifie qu’il existe en leur sein un vécu commun et une histoire commune, forgés de sacrifices et de dévouements des femmes et des hommes, chacun à sa façon et selon un contexte propre à une période cruciale d’une nation. C’est ce qui n’existe pas quand on traite du cas de l’Algérie, une création coloniale datant de la fin du 19ème siècle, donc très récente et un État fantoche depuis 1962.

Indéniablement , c’est cette absence de nation algérienne, comme l’a si bien relevé Ferhat Abbas en son temps, qui explique aujourd’hui l’indifférence générale des algériens quant aux exactions commises par l’Algérie, en matière de droits de l’Homme, des droits des peuples et des libertés individuelles, concernant le peuple kabyle depuis au moins 1962 et, récemment, le peuple Mzab.

Durant des années, on nous a leurré, anesthésié par l’idée que l’Algérie est notre pays, notre nation une et indivisible. On a gaspillé tant d’énergie à défendre l’indéfendable, à faire exister l’inexistant, et à faire le panégyrique d’un pays artificiel. Indiscutablement, l’anesthésie était générale et le réveil était des plus difficiles. Cependant, la conscience est mise à jour et les peuples Amazighs d’Afrique du Nord sont en marche vers leur liberté confisquée par l’Algérie française et ensuite l’Algérie tout court.

Ce qui se passe dans le Mzab actuellement, est à dénoncer sans réserve aucune, car il s’agit tout d’abord d’êtres humains qui sont abattus par un régime connu pour son racisme à l’égard des peuples amazighs d’une part et, reconnu par les organisations internationales , telle que l’ONU en tant que signataire et ratifiant des conventions relatives aux Droits de l’homme , notamment. D’ailleurs, il y a lieu de s’interroger sur le respect par l’Algérie des conditions requises pour adhérer à cette organisation, entres autres « … Être un Etat pacifique … » Article 4 chapitre 2 de la Charte des Nations Unies.

On attend d’une nation qu’elle protège et se solidarise avec ses enfants en toute circonstance.

On a tous en tête les événements du 11 septembre 2001 aux USA et comment la nation Américaine s’est mobilisée à travers la solidarité de tous ses États pour venir en aide à leurs concitoyens, sans qu’il y ait un appel officiel ou une obligation particulière. Ce qui les a guidé, n’est que leur sentiment d’appartenir à une nation, et que cette dernière leur dicte naturellement un devoir de solidarité nationale. Finalement, une nation ne s’improvise pas.

Ce qui n’est pas le cas pour l’Algérie et les exemples sont divers: Le manque de compassion et de réaction des algériens quant au drame kabyle en 2001 est là pour éclairer les esprits sur une vérité absolue qui est que l’Algérie n’est pas une nation et ne constitue pas un peuple.

Aujourd’hui, l’indifférence des algériens face aux assassinats perpétrés par les arabes Chaambas avec la complicité des forces de l’ordre algériennes contre le peuple Mzab, nous démontre que l’Algérie n’est qu’une mosaïque de peuples dont les peuples Amazighs qui sont livrés à eux-mêmes , avec comme ennemi, un Etat colonial qui brime, brûle et assassine.

A l’échelle internationale, il est décevant de constater le mutisme et l’indifférence des « nations dites libres » et de l’Organisation des Nations Unies qui est à des années lumières de ses principes fondamentaux et de ses résolutions citées dans le préambule de sa charte, à savoir : " … Préserver les générations futures du fléau de la guerre … », »… à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine… ». Aujourd’hui, il est plus que légitime et nécessaire pour nous de nous poser la question de la fiabilité de cette organisation, de la viabilité de sa mission de maintenir la paix dans le monde et surtout de sa capacité à réaliser les objectifs pour lesquels elle est née.

Vraisemblablement, l’Algérie excelle dans le racisme contre les peuples Amazighs vivants sur le territoire délimité par le colonialisme et même en dehors de ces frontières. L’exemple de l’Azawad est édifiant en la matière.

A mon sens, les membres de l’ONU, consciemment ou non, font dans le racisme et l’hypocrisie. Sinon, comment peut-on expliquer que malgré les textes onusiens stipulant qu’il n’existe aucune différence dans le traitement des nations, grandes ou petites et que la vie humaine est protégée contre toute agression, on constate malheureusement, que la nation kabyle n’a pas bénéficié de cette protection, ni même le peuple Mzab qui se fait assassiner par l’Etat Algérien, qui rappelle amèrement le Printemps Noir en Kabylie. On l’a vu également dans le cas du peuple kurde qui s’est retrouvé seul pour lutter contre un ennemi international qui est le terrorisme islamiste.

Si un être humain reconnu dans le cadre d’un Etat vaut plus qu’un être humain dépourvu d’un statut étatique, alors les règles internationales absurdes et anachroniques sont appelées à changer rapidement.

L’hypocrisie n’est pas que politique malheureusement elle est aussi médiatique. Le métier d’un journaliste n’est plus ce qu’il était à savoir chercher l’information et surtout la partager. On le constate à chaque fois qu’il s’agit de la Kabylie en particulier ou des peuples amazighs en général. L’exemple de la presse française est très illustratif, concernant la couverture de l’assassinat du joueur de la JSK, ou encore la répression de la marche du MAK en 2014 et aujourd’hui le cas du Mzab.

La réalité d’aujourd’hui , nous impose, à juste titre, de ne pas s’attendre à ce que la presse française déroge à la règle de la politique française, s’agissant de tout ce qui touche de près ou de loin aux conflits entre « l’Etat algérien » et les peuples Amazighs, surtout la Kabylie. En attendant que cette dernière retrouve sa liberté de parole et sa vraie vocation, les peuples opprimés de par le monde, devront leur salut qu’à la seule force de leur conviction et leur détermination à lutter sans relâche ni faiblesse contre la tyrannie et l’injustice.

Chaque peuple en danger a le droit de se défendre avec tous les moyens qu’il jugera nécessaires dans le cadre de la légitime défense. Un moyen reconnu dans le droit international, mais, qui reste réservé aux États et non pas aux peuples sans État. Sauf qu’en l’absence d’un cadre légale, les peuples sans Etats peuvent eux aussi utiliser ce moyen pour se défendre.

C’est parce que la vie humaine est sacrée , la défendre en cas d’agression imminente représente une légitime défense, cette dernière devient ainsi un recours naturel entre les mains des peuples, qu’ils aient leur Etat ou pas.

Vouloir vivre dignement est en soi un droit naturel et inaliénable. Par conséquent, quand bien même que dans la plus part des cas, les peuples sans Etats ne rentrent dans aucun cadre juridique international, pour autant, doivent-ils se laisser faire?

Yacine Cheraiou

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