KABYLIE (SIWEL) – J’invite les kabyles à se concentrer sur les questions qui les concernent au lieu de dépenser leur énergie dans des débats algériens qui ne les regardent en rien. Apprenons à réfléchir, à agir et à construire notre avenir à l’extérieur du cadre algérien qui est synonyme pour nous d’une mort absurde et certaine.

 

La nouveauté de cet été est l’annonce de la ministre algérienne de l’éducation concernant l’introduction de l’arabe « algérien » dans l’enseignement. Les partisans de l’arabo-islamisme sont unanimes à s’opposer à cette mesure qui porte atteinte à la langue du coran.

Les progressistes « algériens » qui se recrutent généralement parmi les anciens militants du Mouvement Culturel Berbèe (MCB) , un mouvement kabyle qui défendait dans les années 80 la reconnaissance des langues populaires, ont salué le projet de Ben Ghobrit justifiant leur soutien par la nécessité d’enseigner les enfants dans leur langue maternelle. Ils avancent même que si l’Arabe classique n’a pas été imposé aux « algériens », ces derniers ne l’auraient jamais appris.

Plusieurs constats s’imposent :

1- Aucun « algérien arabophone » n’a revendiqué son droit d’étudier son « arabe algérien ». Les seuls à défendre cette langue populaire ne sont pas des "arabes populaires" mais des militants du MCB qui en ont fait une des revendications principales de leur mouvement, à savoir : la reconnaissance des langues populaires . Même le MCB, devant l’indifférence des « arabes populaires » a fini, depuis son deuxième séminaire tenu en juillet 1989, par se rendre à l’évidence qu’il défendait une cause qui n’intéressait pas les concernés eux-mêmes et c’est ainsi que les résolutions du deuxième séminaire portaient sur Tamazight sans plus.

2- L’arabe classique est imposé uniquement aux kabyles. Les « algériens » n’ont jamais manifesté le moindre mécontentement à l’égard de cette langue qu’ils chérissent plus que tout. D’ailleurs, même le RCD et le FFS dans leurs programmes ont fini par s’adapter à la réalité en occultant l’existence de l’arabe algérien au profit de l’arabe coranique qu’il reconnaissent comme première langue officielle et en revendiquant l’officialisation de tamazight à côté de la langue d’El Djahidh.

3- L’Arabe algérien a toujours été instrumentalisé par l’Etat algérien pour prouver l’arabité de l’Algérie, et encourager l’arabisation des kabyles et des autres amazighs. Une dynamique sociologique d’arabisation est mise en œuvre à travers l’arabe algérien qui est plus accessible et plus acceptable pour les non arabes que l’Arabe classique qui incarne de manière officielle l’impérialisme moyen oriental.

Le danger vient plus de l’arabe algérien qui est en train d’envahir nos villes et nos villages.

L’Arabe algérien et l’Arabe classique se complètent dans un même processus de substitution linguistique en constituant deux faces d’une même Algérie coloniale arabo-islamique.

4- En tant que kabyles qui aspirent à vivre dignement et librement notre kabylité qui est menacée par les deux langues arabes qui sont des vecteurs de l’arabisme, nous ne sommes pas concernés par ce débat algéro-algérien. Le débat que nous devons initier sera autour de la Kabylité : langue et civilisation, et comment créer des écoles parallèles pour contrecarrer l’impérialisme linguistique incarné aussi bien par l’arabe classique que l’arabe populaire.

Il ne faut pas succomber aux optimismes précipités. Toute mesure émanant du gouvernement algérien , son but est d’accélérer notre extinction. Il ne faut pas se leurrer. L’introduction de l’Arabe algérien dans l’enseignement est une décision qui vise à parachever le processus d’arabisation de la Kabylie.

J’invite les kabyles à se concentrer sur les questions qui les concernent au lieu de dépenser leur énergie dans des débats algériens qui ne les regardent en rien. Apprenons à réfléchir, à agir et à construire notre avenir à l’extérieur du cadre algérien qui est synonyme pour nous d’une mort absurde et certaine.

Vivement un Etat kabyle, démocratique laïc et social

Azwaw Aqvayli

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