PARIS (SIWEL) — L’attitude criminelle de la Turquie et l’attentisme honteux, pour ne pas dire carrément…complice, de l’Occident commence à déranger les consciences. Se désintéresser à ce point du sacrifice de milliers de personnes par des hordes de sauvages qui égorgent à tour de bras devient insupportable et à vrai dire écœurant. la Turquie de M. Erdogan montre son vrai visage et l’occident, la France en tête, en prend un sacré ( et sale) coup. Mais, ne supportant plus l’insupportable, des vois s’élèvent et quelques langues commencent à se délier. Nous vous proposons cet article publié sur BFM TV, à notre grand (et pour une fois.. agréable) étonnement .
Comment comprendre l’attitude turque, voilà le mystère de l’heure. L’on voit les images des chars turcs sur les hauteurs surplombant la ville syrienne déchaînée de Kobané. Cette ville ethniquement kurde est adossée à cette frontière, et les Kurdes situés en territoire turc voient le drame de leurs frères ethniques se dérouler sous leurs yeux impuissants. Rappelons que les Kurdes de Syrie (2 millions) et ceux de Turquie (plus de 10 millions) sont de même souche, une frontière artificielle les séparant depuis les années 1920.
Le Ministre des Affaires étrangères turc, Mevlüt Cavusoglu, nous a proposé, ici à Paris, des explications parfaitement lénifiantes, sur l’impossibilité d’armer des combattants kurdes car ce serait "criminel" d’armer des civils. Et puis ce qui se passe est la faute à Assad, est la faute à l’ancien gouvernement irakien Maliki.
Non, ce n’est pas ça. Il est abondamment clair que la puissante armée turque pourrait entrer dans Kobané et balayer les assaillants du groupe État islamique en quelques heures pour ne pas dire minutes. C’est précisément ce que le gouvernement turc ne veut pas faire, pour trois raisons.
1. Il faut un bakchich
Raison triviale en comparaison des autres, elle consiste à attendre que les Alliés de la soi-disant "Coalition américano-arabe" décident d’envoyer des troupes au sol en Syrie. L’ État turc ne saurait y aller seul, s’exposer sans appui ni concessions occidentales diverses. Il faut gagner quelque chose. Soit. Les Occidentaux ont tellement peur que la Turquie devienne l’homme sauvage du Moyen-Orient qu’ils n’osent pas la contrarier, même s’il ne s’abaissent pas encore à offrir les concessions en vrac.
2. "A bas les Kurdes"
C’est ici la raison profonde. Le pouvoir politique kurde est vu, par tous les gouvernements successifs de Turquie, comme un danger pour l’unité turque. Ce pouvoir kurde est soit trop marxiste, soit trop légitimement différent des Turcs ethniques, pour ne pas être un danger.
Non, il n’y a pas de pétrole dans les régions kurdes, seulement des Kurdes peu attirés par le projet national turc d’unicité ethnique. Si le président Recep Tayyip Erdogan ordonne le sauvetage militaire des combattants kurdes de Syrie — les YPG, issus du parti politique PYD –, il sauvera la cause kurde en Syrie. S’il fait cela, alors les Kurdes turcs, groupés autour de leur parti révolutionnaire PKK, voudront, selon le président turc, obtenir un rôle dans la protection de leurs frères syriens.
3. Rétablir le califat ottoman
Raison plus spéculative, elle consiste à voir en Recep Tayyip Erdogan un restaurateur de l’Empire ottoman, avec son sultan qui exerçait la fonction de calife. Plus islamiste que jamais, ce que nul ne niera aujourd’hui, Erdogan veut instaurer son propre califat! Pour cela, autant sacrifier les Kurdes là où il peut. Il saura toujours reprendre en main le groupe État islamique, qui a eu l’audace ridicule de se proclamer califat à Mossoul.
Conclusion: les raisons turques de sacrifier les Kurdes de Kobané sont profondes, et ébranlent les confortables certitudes occidentales, à toute vitesse.
Écrit par Harold Hyman sur BFMTV international
SIWEL120106 OCT 14
Pour lire l’article à partir de sa source