DIASPORA (SIWEL) — » il est certain que si les responsables des Mouvements de l’Azawad acceptaient d’apposer leurs signatures sur l’accord d’Alger sans tenir compte des amendements de Kidal, ils perdraient immédiatement et automatiquement toute légitimité à représenter les populations de ce territoire et leur acte n’engagerait alors que leur propre personne. »
Après plusieurs mois de discussions entre les organisations représentant l’Azawad et le gouvernement malien, sous les auspices de l’Algérie, un projet d’« accord pour la paix et la réconciliation au Mali » a été élaboré et soumis à la ratification des peuples concernés.
Il est d’abord essentiel de rappeler que c’est le non-respect par l’Etat malien des précédents accords conclus avec l’Azawad depuis les années 1990 et l’état d’abandon à la pauvreté et aux trafics en tous genres dans lequel ont été laissées les régions du « nord-Mali », qui ont provoqué la révolte des populations de l’Azawad et qui les ont conduites à créer le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA). Ce dernier, composé de citoyens-combattants a très vite conquis tous les territoires de l’Azawad et s’apprêtait à instaurer la « République de l’Azawad », en vue de répondre aux aspirations des populations de ce territoire situé au nord du fleuve Niger. Des parties étrangères hostiles à l’Azawad, ont alors entrepris de manière machiavélique, de créer et de susciter la création de différents groupes armés se prétendant « islamistes » mais aux contours idéologiques et politiques flous, puissamment dotés en armements et en moyens financiers, dans le seul but de semer le chaos afin de torpiller le projet d’indépendance de l’Azawad.
Cela a ensuite justifié l’intervention militaire française et celle d’une force internationale mais sans jamais répondre ni au désespoir des populations, ni à la question légitime du droit à l’autodétermination posée par le peuple de l’Azawad.
Face aux pressions internationales mais aussi parce qu’il est un fervent partisan de la paix, le MNLA a accepté de respecter « l’intégrité territoriale du Mali » et de sursoir ainsi à son projet d’indépendance mais à la condition que soit reconnu à l’Azawad, un statut d’autonomie, impliquant notamment de larges compétences normatives, dans l’exploitation et la gestion du territoire et de ses ressources et en matière de sécurité.
Or, que constate t-on à la lecture de « l’accord d’Alger » ? Le texte proposé ne mentionne nullement la reconnaissance d’un quelconque statut d’autonomie pour l’Azawad et à ce titre, il constitue un recul même par rapport au « pacte national » signé il y a plus de 20 ans entre le Mali et l’Azawad, qui prévoyait « un statut particulier » pour l’Azawad.
Ayant fait une immense concession sur la question de l’indépendance, le MNLA et les autres mouvements aujourd’hui coalisés au sein de la Coordination des Mouvements de l’Azawad, pouvaient espérer un engagement plus clair et plus fort de la communauté internationale pour la mise en place du statut d’autonomie pour l’Azawad. Au contraire et de façon tout à fait incompréhensible, cette « communauté internationale », dont l’Algérie et la France en premier lieu, pressent les dirigeants de l’Azawad de signer « l’accord d’Alger », contre toute logique et surtout, contre la volonté des populations de l’Azawad qui ont démocratiquement exprimé leur rejet de ce texte.
En effet, l’assemblée des populations de l’Azawad réunie à Kidal le 16 mars dernier, après avoir longuement débattu sur le contenu du texte, a décidé de ne pas ratifier cet accord en l’état et a proposé un certain nombre d’amendements portant sur les aspects politiques et institutionnels, sur la sécurité, sur le développement socioéconomique et sur la gouvernance du processus de paix.
Malgré cette consultation démocratique exemplaire et la décision exprimée par le peuple de l’Azawad et ses propositions d’amendements, la communauté internationale fait mine de ne rien avoir vu ni entendu et maintient son forcing sur les membres de la Coordination des Mouvements de l’Azawad afin qu’ils signent « l’accord d’Alger » sans aucune modification. Cette attitude de mépris envers le peuple de l’Azawad et ce déni de démocratie la plus élémentaire, sont à la fois contraires aux valeurs humaines universelles et à la déontologie relative à la médiation et porteurs du risque de radicaliser une partie de la population et d’éloigner toute possibilité de ramener la paix dans la région.
Par ailleurs, il est certain que si les responsables des Mouvements de l’Azawad acceptaient d’apposer leurs signatures sur l’accord d’Alger sans tenir compte des amendements de Kidal, ils perdraient immédiatement et automatiquement toute légitimité à représenter les populations de ce territoire et leur acte n’engagerait alors que leur propre personne.
Il en est de même pour « la médiation » actuelle qui perdra chaque jour un peu plus sa crédibilité si elle continue comme elle le fait, à se substituer à une des parties pour imposer une issue défavorable à l’autre partie.
D’une manière générale, les pressions exercées par les « médiateurs » sur les représentants de l’Azawad afin qu’ils signent l’accord sans tarder, sont à la fois inacceptables et de toutes les façons infructueuses car tout accord obtenu par le chantage et les menaces et par conséquent contre la volonté des populations concernées, est voué à l’échec. Les populations de l’Azawad lasses des violences et des souffrances qui leur sont imposées depuis trop longtemps par les forces prédatrices étrangères, exigent aujourd’hui une solution porteuse d’une paix juste et durable. Il appartient donc à la communauté internationale, notamment à l’ONU, de veiller scrupuleusement à ce que la solution proposée soit équitable et repose sur le principe du « consentement préalable, libre et éclairé » du peuple, conformément à la Charte des Nations Unies.
Paris, 10 mai 2015
P/Temoust
Abdoulahi ATTAYOUB, Président
P/CMA
Khalid Zerrari, Président
SIWEL 151727 MAI 15