Chaque fois que j’entends s’exprimer Mohammed Moulessehoul, alias Yasmina Khadra, la phrase de Hannah Arendt me revient en écho : « C’est dans le vide de la pensée que s’inscrit le mal. » Et inévitablement, je pense à la catégorie de kabyles qui persistent – par naïveté ou par peur – à ignorer la nature de ce mal rampant. À eux, je rappelle que le monstre ne connaît pas de limites. Guidé par ses instincts, il dévore tout sur son passage et cherche encore, au-delà, de nouvelles proies.
Pour comprendre des figures comme Moulessehoul, dans leurs pulsions les plus sombres, celles qui me refusent le droit d’exister en tant que moi-même, il faut savoir ce qu’est la haine. Ce sentiment destructeur, c’est ce qui pousse un être à vouloir du mal à un autre, à se réjouir de ses malheurs. Cette haine peut naître de traumatismes, d’un besoin de revanche, ou d’une volonté de dominer. Freud y voyait une composante du développement de l’enfant, confronté à la peur de perdre sa place auprès de ses parents à la naissance d’un autre, et à l’angoisse de la séparation. Chez l’adulte, elle devient violence psychique, miroir d’une frustration profonde.
Qu’elle est donc cette frustration chez Moulessehoul, qui fait jaillir en lui une haine pavlovienne dès qu’il entend le mot Kabyle ? D’où vient cette « bédouinerie » qui m’interdit, chez moi, de dire que j’ai une histoire et une mémoire millénaires, un nom séculaire, une organisation sociale propre sur la terre de mes ancêtres ?
Vous vous acharnez contre la Kabylité parce qu’elle vous dérange, et vous renvoie l’image déformée de votre être qui ne trouve place ni grâce en terre nord-africaine. La Kabylie est le miroir d’une mémoire millénaire qui vous confronte à l’image déformée de ce que vous êtes devenus vous et vos semblables, de ce côté obscur façonné par une idéologie de l’ailleurs, d’une Algérie devenue étrangère à elle-même. Elle vous confronte à votre propre aliénation, celle d’un être détaché de toute authenticité.
Ce rejet de la mémoire kabyle peut être saisie comme l’une sinon la clé de compréhension du naufrage de ce pays, générant une identification de soi détachée de la personnalité globale et donc une absence de repères essentiels et une rupture dans la transmission de la mémoire collective dans ses formes, dans son éthique en tant que processus qui puisse constituer un lien entre passé, présent et avenir et permettre une cohérence et un développement de la pensée créatrice. C’est là, la dramaturgie d’une pensée que la vôtre, qui draine dans son sillage cette idée d’unicisme idéologique qui fait du Kabyle un ennemi. On chante les droits de l’Homme, on fredonne la liberté, mais… ailleurs, à Kaboul par exemple.
À travers vous, Mohammed Moulessehoul, ce message s’adresse à tous ceux que vous avez entraînés dans le reniement d’eux-mêmes, dans la frustration, la violence et la haine de l’autre, à tous ceux qui refusent ce qui ne leur ressemble pas, et donc, qui refusent mon être. Mais qu’à cela ne tienne, je continuerai d’être l’enfant libre du pays kabyle, qui se détache définitivement de votre échiquier historique et identitaire falsifié.
SIWEL 261926 JUL 25
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