RIF(SIWEL) — Il s’appelait Mouhcine Fikri, il avait 31 ans et était vendeur de poissons à El Hoceima, dans le Rif. Le 28 octobre, il décède tragiquement broyé par une benne à ordure alors qu’il tentait de s’opposer à la destruction par des agents de la ville de sa marchandise. La mort de Mouhcine Fikri a indigné le peuple rifain qui a organisé plusieurs manifestations pour dire halte à la Hogra.
Pour la presse occidentale, cela rappelle le cas de Mohamed Bouazizi, le vendeur ambulant tunisien, qui s’est immolé en décembre 2010 et qui a été à l’origine des émeutes qui ont précédé « la révolution tunisienne ».
L’évènement a été largement relié sur les réseaux sociaux à travers une photo où on voit la tête et un bras de Mouhcine Fikri, inanimé. Le reste du corps étant pris dans le mécanisme du compacteur d’un camion-benne.
Les internautes kabyles ont été également secoués par cette tragédie et les manifestations qui ont suivi. Le fait que les manifestants ont brandi le drapeau berbère en appelant à la « vérité » sur la mort du « martyr Mouhcine » et s’indignent de la « hogra » qu’ils subissent de la part du Makhzen, cela rappelle les évènements du printemps noir de 2001 où un jeune lycéen, Massinissa Guermah, a été assassiné sans aucune raison par la gendarmerie algérienne. Un évènement qui a été suivi de manifestations réprimées dans le sang partout en Kabylie et qui ont concouru à la naissance d’un mouvement citoyen contre la « hogra » et en faveur de revendications politiques, sociales et surtout en faveur d’une reconnaissance identitaire par l’Algérie officielle.
A la différence des évènements de Kabylie où le ministre de l’Intérieur de l’époque, Yazid Zerhouni, avait traité Massinissa Guermah de voyou, le ministre de l’intérieur marocain, Mohammed Hassad, a réagi en déclarant : « On ne peut pas accepter que des responsables agissent dans la précipitation, sous la colère, ou dans des conditions qui ne respectent pas les droits des gens » après avoir annoncé l’ouverture d’une enquête « minutieuse et diligentée ». Les appels à l’apaisement du Makhzen témoignent du renoncement des gouvernants en Afrique du nord d’être dans la défiance face aux peuples de peur de revivre un « printemps noir kabyle » ou une « révolution tunisienne ».
Quoi qu’il en soit, la colère des citoyens gagne de l’ampleur partout dans le Rif. Le 30 octobre des dizaines de milliers de personnes ont participé aux funérailles de Mouhcine Fikri. Le cortège funèbre est parti d’El-Hoceima jusqu’à Imzouren, où la dépouille a été inhumée, au terme d’une marche de plusieurs heures.
nbb
SIWEL 311357 OCT 16