Lettre ouverte de Massa Sakina At Sliman, porte parole de la Présidence de l’Anavad, à Monsieur Bernard Deschamps, Ancien député communiste du GARD
Président d’honneur de l’Association France El Djazaïr et membre de la Fédération Nationale des Anciens Combattant d’Algérie (FNACA)
Monsieur,
En réponse à votre lettre de dénonciation du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) du 25 septembre 2017, étant moi-même à titre personnel syndiquée à la CGT et militante du MAK, je dois vous dire combien j’ai été choquée par le contenu de votre courrier à propos de la participation du MAK à la Fête de l’Humanité.
Il apparaît que vos propos sont en contradiction totale avec le contenu de vos contributions du 30 septembre 2017 en faveur « du droit à l’autodétermination de la Catalogne » et du 2 octobre 2017 sur « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ».
Le MAK-Anavad qui vient de déposer, aux Nations Unies, un mémorandum pour l’autodétermination du peuple kabyle, devrait plutôt, bénéficier sinon de votre soutien, du moins de votre sympathie. Il n’est nullement le méchant loup que vous décriez et ne sera jamais un mouvement extrémiste. Bien au contraire. Il s’oppose à la violence, cultive les valeurs universelles propres au peuple kabyle, défend la laïcité et prône le respect des droits humains. Soit vous avez été désinformé à son sujet ou votre position est dictée par des considérations que je n’ose même pas imaginer.
Son Président, Monsieur Ferhat Mehenni, a été scolarisé dans un orphelinat de l’indépendance de l’Algérie et son fils Ameziane a été assassiné à Paris en 2004 par le pouvoir algérien pour le punir d’avoir osé défendre la dignité et les droits du peuple kabyle. C’est les mains nues qu’il s’est toujours dressé contre la dictature qui l’a emprisonné pas moins de douze fois. Marxiste dans sa jeunesse, il a chanté l’idéal socialiste dont témoignent encore ses chansons comme « Imesdurar » (les montagnards 1978) ou « Che Guevara » (2002).
Situation cocasse où je dois apprendre à un ancien député, qui donc a eu à légiférer à l’Assemblée nationale, que l’antisémitisme est un délit car sachez pour votre gouverne que l’une des personnalités qui avaient accueilli en Israel le président Ferhat Mehenni en 2012 , n’est autre que Danny Danon, actuel président de la commission juridique des Nations unies.
Interrogez plutôt votre conscience pour savoir au nom de quoi vous soutenez un pouvoir assassin, corrompu, raciste et irrespectueux de la vie humaine. Combien d’opposants démocrates a-t-il déjà exécuté ? Krim Belkacem, Khider, Me Mecili … la liste est longue. Si vous y ajoutez les deux-cents milles morts de la décennie noire dont il porte l’entière responsabilité, il n’y a vraiment pas de quoi être fier de votre sympathie. Le régime algérien n’est pas l’idéal de gouvernance dont rêvaient ceux qui s’étaient battus pour l’indépendance de l’Algérie, il en est le cauchemar.
Comment pouvez-vous venir en aide à un pouvoir mafieux qui a vidé les caisses de l’Etat et dilapidé l’argent des peuples composant cette « Algérie » ? Même si vous êtes régulièrement invité en tant que VIP par ce même pouvoir, faut-il rappeler que vous avez eu droit aux honneurs à Alger lors de la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance algérienne en 2012. Rien que pour la période de Bouteflika (de 1999 à ce jour), pas moins de 1 000 milliards de dollars américains ont été détournés vers des comptes privés à tel point que l’actuel Premier ministre n’a plus de quoi payer les salaires des fonctionnaires de novembre sans recourir à un financement non conventionnel.
Le FLN de la guerre d’indépendance est mort au moment où les planqués des frontières ont pris le pouvoir par la force des chars et la terreur politique d’une dictature féroce depuis 1962, au détriment des maquisards kabyles armés de leurs simples fusils de chasse.
Je me permets de vous informer qu’en 2001, Bouteflika a ordonné de tirer sur des jeunes Kabyles faisant parmi eux 129 victimes en majorité des jeunes de 12 à 30 ans, dont Kamel Irchène, touché à mort par les balles assassines des gendarmes algériens, qui eut la force d’écrire sur un mur, avec son sang le mot : « Liberté ».
Je vous exhorte de revenir sur votre position, comme vous l’avez écrit à propos des Catalans et des Kurdes. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes s’applique sans distinction à tous les peuples épris de liberté, conformément aux textes fondamentaux des nations unies.
Madame Sakina At Sliman
Porte-parole de la Présidence du Gouvernement provisoire kabyle en exil (Anavad)
SIWEL 102135 Oct 17 UTC