PARIS (SIWEL) — Une belle manifestation de force lorsque l’union est là, une manifestation de conscientisation, de mise en avant d’un esprit kabyle forgé par une culture millénaire , une culture éclairante de liberté, de respect de soi et de respect des autres, respect des lois et règles de vie du pays d’accueil, la France, qui n’est nullement ignorante des valeurs universelles que porte en elle la Kabylité, quel que soit le poids des relations internationales ; une démonstration d’un savoir vivre d’un peuple des plus enracinés dans ses valeurs ancestrales qu’il a toujours projetées dans l’universalité et dont l’Occident s’est beaucoup inspiré (exemple marquant: la Laïcité) . Un appel à la condamnation de l’arbitraire, de la trahison des faux dévots, de l’opportunisme aveugle. Une manifestation dans « l’expression de l’exil » dans l’espace et dans le temps, une manifestation de la « déchirure interne ».
Dans mon moment de solitude, il m’est revenu à l’esprit la quête de Jean Muhuv Amrouche qui écrivait et décrivait son mal profond : « Je sais bien où m’attends Jugurtha : il est partout présent, partout insaisissable ; il n’affirme jamais mieux qui il est que lorsqu’il se dérobe. Il prend toujours le visage d’autrui, mimant à la perfection son langage et ses mœurs ; mais tout à coup les masques les mieux ajustés tombent, et nous voici affrontés au masque premier : le visage nu de Jugurtha ; inquiet, aigu, désespérant. C’est à lui que vous avez affaire : il y a dix-huit millions de Jugurtha, … ».
C’était l’homme Kabyle, Chrétiens, forgé par les humanismes français, qui se débattait de toutes ses forces contre les atrocités de la colonisation. Intellectuel, homme de lettres, poète essayiste, analyste dont les grandes figures françaises tels Paul Claudel, André Gide, François Mauriac ont cherché l’amitié, homme qui avait attiré le respect et l’estime du Général De Gaulle lui-même, lui qui a été un intermédiaire distingué entre le pouvoir français et le FLN puis le GPRA a choisi à l’instar d’Albert Camus sa mère. Rien n’est venu émousser la profondeur de son attachement à ses racines et l’exigence de la validité de ses origines.
Moi, j’ai remplacé Jugurtha par ma mère nourricière qui me parle encore et toujours. Je lui dis : « Je sais où tu es, je sais que tu m’attends. Tu es présente en moi, tu habites mon cœur et ma raison. Tout autour de moi, ta voix me harcèle et me parvient de tous les côtés, me mettant en garde contre l’arbitraire, la trahison des faux dévots, contre les opportunismes de tout acabit. Tu me contes ta déchirure quant à l’incroyable dérive d’un régime devenu fou dans un système sclérosant qui a déclaré la guerre à l’expression de l’opinion, à la liberté, qui assigne à l’exil forcé et qui te plonge Ô mère dans une tragique condition. Tu me guides sur le chemin de la liberté et de la libération afin que demain tu puisses enfin me prendre dans tes bras et que je puisse me blottir tout entier en ton sein car je serai sorti du carcan de la déchirure et de l’exil. Nous rassemblerons les parties de notre monde éclaté et nous panserons nos blessures. Tous les deux on criera, on chérira et on écrira à nouveau : Liberté, tu es mon univers.
Raveh UrahmunParis,
le 11 Octobre 2021
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