KABYLIE (SIWEL) — Des connaissances m’ont fait partager deux textes qui m’ont interpellé et incité à réagir. Je ne suis pas un historien, ni un scientifique. Je tente à mon humble niveau d’exprimer le fruit de mes réflexions, une opinion forgée durant mon vécu et construite grâce aux informations recueillies au gré de mes différentes lectures et de l’intérêt inspiré par le sujet. Je n’ai pas participé à la guerre, né à la fin des années 50, témoin comme beaucoup de Kabyles et d’Algériens des soubresauts ayant ébranlé l’Algérie postindépendance. À travers mon propos, mon intention est d’apporter la contradiction et donner un sens à mes réponses.
L’un est de Mr Benyoucef Benkhedda qui aborde la « crise berbériste » dans un article intitulé « le berbérisme, produit de la colonisation » paru sur Le Quotidien d’Algerie Jeudi 21 Mai 2009 *(1).
L’autre est une citation tirée d’un livre de l’écrivain égyptien Tewfik El Hakim. Ce livre a pour titre le Syndrome de la dictature dans lequel sont mis en exergue 3 choix qui affectent les victimes de la dictature : devenir corrompu, s’isoler, émigrer*(2).
*(1) Mr Benyoucef Benkheda, décédé en 2003, savait qu’une partie des Algériens habitent un territoire qui a pour nom : la Kabylie. Mais il était dans le déni. La fin de sa vie politique le confirme. Pour lui, L’Arabité, l’islam et rien d’autre. Mon père et ma mère sont nés en Kabylie, n’ont jamais parlé, ni compris l’arabe. Avant tout autre sentiment d’appartenance, ils sont d’abord Kabyles. Je le suis donc et le serai toujours. Je rejette l’arabo-islamisme qui détruit les âmes, les cultures, les êtres pour les transformer en ectoplasmes ou zombies et produire des avatars de l’obscurantisme. On peut citer beaucoup d’exemples qui montrent la persistance de l’idéologie arabo-islamiste (voir la période 1990-2000 et ses retombées, appelée décennie noire) dont le prolongement serait, en substance, l’instauration d’un état selon les principes islamiques. Il m’est impossible de cautionner cette idéologie qui vient d’ailleurs. Le témoignage de monsieur Benkhedda n’est pas dénué d’arrière-pensées, et c’est normal, il n’est pas Kabyle.
Aujourd’hui, La Kabylie est infestée de mosquées et un travail de sape est entrepris pour anéantir tout ce qui ressemble à la Kabylie, faire taire sa langue et enfin pervertir sa société. Ce que doivent faire les Kabyles, c’est de combattre les idées de Benkhedda. Il porte bien son nom ! Il a trahi les Kabyles puisqu’il s’est rallié à l’islamisme et à l’arabisme. Au début, durant la guerre d’indépendance, il s’affichait comme nationaliste, et defendait l’arabité et l’islam comme seuls éléments de l’identité algérienne en rejetant le mouvement berbère. De fait, il a combattu les Amazighs même s’il reconnaît à Abane Ramdane, Kabyle qui voulait être rassembleur mais à ses dépens, son intelligence et son combat patriotique pour l’indépendance de l’Algérie au détriment de la Kabylie. Abane Ramdane, en avait-il le choix ? Le contexte était hostile et ne se prêtait pas à ouvrir un autre front pour imposer ses vues. Il avait pris le pari de réunir toutes les forces en présence, en faisant passer au second plan sa kabylité, voire en sacrifiant ses frères, contre un ennemi commun : le colonialisme. Il s’est battu contre l’armée française en faisant fi de son identité première. Il pensait qu’après la victoire, les cartes seront rebattues mais c’était compter sans les opposants au sein de l’organisation FLN, à l’image de Benkhedda qui ne voulait pas entendre parler de la spécificité kabyle. Abane Rammdane fut assassiné par ceux-là même qu’il défendait, rejoignant ainsi le chapelet des victimes d’assassinats politiques et de la trahison. Il s’est trompé et les événements recents le confirment. On voit bien de ce qu’il est advenu aujourd’hui de l’idéal Kabyle. Un Kabyle est de moins en moins Kabyle. D’ici à quelques années, si l’encerclement de la kabylie se poursuit, son arrêt de mort sera prononcé. C’est l’histoire qui balbutie. La mort de Ali Laîmeche, disparu très tôt de maladie, et les assassinats de Benaï Ouali, Ait Hammouda et Mbarek Ait Menguellet par leurs « frères algériens » auguraient avec le recul les jours sombres que traverse l’Algérie d’aujourd’hui. Ces Kabyles défendaient leur langue et leur liberté, tout naturellement.
Le système algérien érigé sur l’esprit de clan se sent tellement fort qu’il semble indestructible. Mais ce n’est qu’apparence qui brouille la vue, elle peut être effacée d’un trait, disparaître face à une déferlante revolutionnaire sérieuse et puissante.
On peut remplacer les hommes à l’infini. Ils seront toujours fidèles au système et ne dérogeront pas à la règle. C’est comme une voiture vétuste trop abîmée, on peut la réparer en changeant les pièces usées, il s’agit du même véhicule et il suffit d’effectuer le tour de ce dît véhicule pour s’apercevoir des coups maquillés grossièrement. Il faut le mettre à la casse, et à l’instar d’un véhicule incapable de rouler, il faut casser et détruire ce système pour en inventer un autre qui respecte les droits et les aspirations de tous les peuples « d’Algérie », en particulier le peuple Kabyle. Quand un système utilise en permanence les mêmes ficelles, le discours mensonger ne trompe plus personne. La vérité ne peut être tue indéfiniment, elle sort toujours victorieuse de ses censeurs. La réalité le rattrape et impose sa disparition en le jetant dans les poubelles de l’histoire. C’est une question de temps qui donnera son verdict à la fin. La nature ne ment pas et fait bien les choses, les feuilles jaunies tombent aussi en automne pour se régénérer et donner naissance à un nouveau processus plus fécond. Humainement, certains diront que c’est la révolution métamorphosée en bourreau de l’imposture qui suscitera l’espoir à des hommes et des femmes épris de liberté.
*(2)L’Algérie est un pays tenu par une dictature militaire parée d’islamisme puisqu’elle cède aux revendications des islamistes. Dans les faits et à des fins politiques, elle les encourage, en réalité, elle les partage. On peut dire que les idées de la mouvance islamiste sont au coeur du pouvoir, pour preuve toute la politique algérienne tourne autour de l’islam. Si on comprend bien ce syndrome, le désespoir guette les algériens, aucune issue conduisant à la paix ne se dessine à l’horizon dans la mesure où le choix se résume donc à 3 caractéristiques, devenir corrompu, s’isoler et émigrer. Pour être complet, j’ajouterai l’élimination physique et autre technique qui pousse au suicide ! Aucune autre échappatoire n’est permise. J’estime que rien n’est perdu pour peu que les bonnes volontés se réunissent.Les peuples d’Algérie doivent réfléchir et se révolter contre ce système et oublier le mouvement du 22 février 2019 (hirak) qui a perdu de sa substance car il est inféodé. Dès sa naissance, je le soupçonnais d’être canalisé, sous influence, sans leader déclaré. Bref, des forces obscures agissent dans l’ombre de ce mouvement, au détriment des intérêts des gens honnêtes, pour en tirer tous les bénéfices, autrement dit au profit du système mafieux. La seule solution, c’est rompre et ne pas se corrompre avec la politique de la rapine, du mépris et de l’obscurantisme. Chaque peuple doit se prendre en charge. Cette refondation doit être entreprise dans le cadre des choix des peuples et non pas dans l’unique choix de l’Algérie. Sans aucun doute, c’est un projet politique très difficile à mener, mais si les initiateurs sont extraordinairement résolus, ce projet est forcément réalisable et requiert bien sûr de l’intelligence et du savoir faire pour surmonter tous les obstacles les plus imprévisibles. L’histoire nous a suffisamment appris sur des situations figées qui se transforment favorablement par la force de la conviction et de la détermination. Nous ne devons pas insulter l’avenir. S’armer de patience pour vaincre ou contourner l’adversité, le temps viendra à bout de toutes les malédictions.
Amayas ISSIAKHEM
SIWEL 071400 JAN 21